Olivia Rosenthal

On n'est pas là pour disparaître


Verticales
Dès les premières pages du livre, Olivia Rosenthal s'interroge sur les raisons qui la poussent à écrire sur la maladie d'Alzheimer. L'exercice n'a en effet rien de réjouissant, d'autant que comme elle le dit avec une pointe d'angoisse, les auteurs font souvent preuve de superstition : «Les auteurs sont souvent superstitieux. Ils n'aiment pas raconter des événements épouvantables bien qu'entièrement inventés, de peur que la fiction ne finisse par rejoindre la réalité et que, par on ne sait quelle opération magique, ce qu'ils pensaient être le fruit de leur imagination ne se produise dans leur existence même». On comprend alors qu'il y a au cœur de cette entreprise romanesque quelque chose de la mise en danger, de l'urgence de se confronter avec l'abyme, et cela donne à On n'est pas là pour disparaître une intensité bouleversante. Que ce soit dans l'étude du cas de Monsieur T, coupable d'avoir tenté, dans un accès de folie, d'assassiner son épouse à coups de couteaux, dans le constant dialogue avec le lecteur pour l'inviter à prendre conscience du néant tant redouté, ou bien dans l'exploration très personnelle de questions aussi aigues que la perte, l'angoisse de la maladie et la peur de la mort, Olivia Rosenthal n'a qu'un objectif. Dire, par tous les moyens romanesques et narratifs, ce que c'est que la difficulté d'être un homme : «c'est compliqué [...] de faire comme si c'était normal / comme si c'était normal de vivre / et de mourir / comme si ce n'était pas révoltant / humiliant / désespérant / comme si on n'avait rien de mieux à faire / qu'attendre / c'est compliqué / d'accepter la mort / de ses parents / de ses amis / et bientôt la sienne». YN


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JOSÉ GONZALEZ