JIRO TANIGUCHI

Le Sauveteur (Sakka / Casterman)


Devenu en quelques années l'un des auteurs de manga les plus populaires en France, Jiro Taniguchi n'en continue pas moins de nous surprendre par son talent sans cesse renouvelé, mais surtout pas sa capacité à aborder les genres les plus divers avec la même aisance : œuvres intimistes, récits d'alpinisme, romans d'apprentissages animaliers, épopées martiales historiques, encyclopédie des animaux de la préhistoire (sic)… Mais aussi, et c'est une nouveauté, polar trouble et sans concessions avec ce Sauveteur franchement enthousiasmant, à mi-chemin de thématiques familières à l'auteur (l'éclatement de la structure familiale, la montagne comme incarnation du dépassement de soi, l'humanité à fleur de peau de personnages a priori anodins) et de territoires nouveaux (le roman noir, et l'urbanité interlope de Tokyo). On y suit l'enquête oppressante de Shiga, gardien de refuge dans les Alpes japonaises, perdu dans l'effervescence des nuits de Shibuya, quartier branché adolescent de Tokyo, à la recherche de sa nièce portée disparue. Un scénario et une ambiance sombre qui rappellent curieusement Hardcore, l'excellent film de Paul Schrader, d'autant que la jeune disparue semble avoir flirté avec le milieu des “hôtesses de bar” et leurs troubles relations tarifées. Ce qui n'empêche pas l'auteur d'imprégner le récit de son ton si particulier, notamment lors d'un final haut en couleur. DG


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RÉGIS JAUFFRET