Sweet home

Arnaud Cathrine / Gallimard Folio


Ceux qui ont découvert Arnaud Cathrine cet hiver avec la publication de l'excellent La Disparition de Richard Taylor peuvent désormais se procurer son précédent roman à un prix abordable puisque Sweet home vient tout juste de paraître en format de poche. Jeune écrivain très prolifique (déjà une dizaine de titres), celui qui écrit également des textes pour le musicien Florent Marchet a construit un univers romanesque d'une très grande singularité dont l'adolescence, le deuil et la solitude font systématiquement partie. De tout cela, il est donc question dans Sweet home, un roman polyphonique où trois frères et sœurs - Lily, Vincent et Martin - témoignent d'un évènement qui a marqué leur enfance, à savoir le suicide de leur mère. Séparés d'une dizaine d'années, ces trois récits donnent à voir les trois temps du drame : Lily évoque la période où les premiers signes du malaise apparaissent et que le vernis bourgeois ne parvient plus à masquer les fissures d'un couple à la dérive et d'une femme en perdition. Le suicide de la mère, la dissolution du clan familial sont au cœur du récit de Vincent, dont les préoccupations sont aussi littéraires puisque ce personnage est devenu écrivain. L'héritage du deuil que Martin, pourtant très jeune à la mort de sa mère, ne parvient toujours pas à assumer, constitue une dernière partie absolument poignante. Comme son titre le suggère avec ironie, Sweet home est un roman d'une très grande violence sur la cruauté de l'environnement familial, l'impossible cicatrisation des blessures adolescentes et le douloureux «exercice de deuil» dans lequel Arnaud Cathrine nous plonge avec beaucoup de mélancolie par le prisme d'une langue à la fois limpide et brutale. YN


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