Le Scaphandre et le papillon

de Julian Schnabel (Fr, 1h52) avec Mathieu Amalric, Emmanuelle Seigner, Marie-Josée Croze...


Jean-Dominique Bauby était rédacteur en chef de Elle quand un terrible accident vasculaire le condamna au locked-in syndrome : ses facultés cérébrales ne furent pas touchées, mais son corps resta entièrement paralysé, à l'exception de sa paupière gauche. C'est avec elle qu'il dicta un livre autobiographique, Le Scaphandre et le papillon, dont Julian Schnabel (Basquiat, Avant la nuit) tente ici une adaptation hautement risquée. La réussite du film réside entièrement dans le fait que le cinéaste l'écrit avec la caméra, que ce soit celle, subjective et fixe, de Bauby sur son lit d'hôpital, ou celle, légère et mobile, qui fait remonter à la surface «l'imaginaire et la mémoire», les deux autres «facultés intactes» de l'écrivain. D'un côté, les visiteurs doivent impérativement se tenir dans le champ, et seul le présent, tragique et contraint, n'existe alors ; de l'autre, le champ s'ouvre sur d'infinies possibilités, images d'archives, flash-backs, rêves... La photo remarquable du chef-opérateur attitré de Spielberg contribue beaucoup à épouser le point de vue de Baudy, jusque dans sa dérision vis-à-vis de cet empêchement physique. Schnabel est moins à l'aise quand il s'agit de regarder le corps immobile et difforme d'Amalric, par ailleurs excellent, et le film perd de sa pertinence dans sa deuxième partie. Cela dit, on est loin du pathos à thèse de Mar adentro ; Schnabel renvoie même Amenabar littéralement à son «obscénité» dans le passage où Bauby affirme, dans un moment de désespoir, sa volonté de mourir... À l'inverse, Le Scaphandre et le papillon garde sans cesse une grande dignité, et même un certain humour. Le film est toujours du côté de la vie, sensible comme son personnage au monde, aux souvenirs et, surtout, aux femmes, toutes plus sublimes les unes que les autres.CC


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