RADICAL FACE

Ghost Morr Music / Nocturne


Après un dépoussiérage en règle opéré par le post-modernisme anti-folk, le folk américain ne cesse de livrer depuis un moment des disques plus audacieux les uns que les autres. Laissant à son homologue scandinave les clés de l'orthodoxie menuisière pour réinterpréter le genre à coups d'évangiles pop. Radical Face (alias Ben Cooper, moitié d'Electric President) délaisse donc lui aussi les terres fertiles et piétinées de l'Americana pour une échappatoire céleste dont il n'a aucun mal à trouver la voie. Peut-être parce qu'il l'a enregistré dans un hangar de Jacksonville Beach, Floride, à coup sûr pendant qu'un ouragan dévastait les alentours, Ghost est pourtant une épopée intérieure. Un disque qui explore la mémoire des maisons, les souvenirs qui imprègnent les murs, la confrontation entre ceux qui y vivent et leurs fantômes. Point donc ici de route à prendre, ni de champs de coton à moissonner, mais un chant ouaté où se pelotonnent des chœurs en colimaçons, tissant des symphonies de poches percées (Glory invite les orages du label Constellation chez Sufjan Stevens). Impossible, pourtant, de ne pas ancrer Ghost dans une tradition folk qui vient justement hanter ce disque d'un coup de banjo, ou quelques touches de piano ectoplasmique (Wrapped in piano strings). Comme chez Sufjan Stevens ou le poète transcendantaliste Ralph Waldo Emerson, l'évocation d'une micro cosmogonie américaine parvient ici à dresser une carte de l'universel. Et à force de faire danser la poussière, remplit le ciel d'étoiles. SD


<< article précédent
AMON TOBIN