Relatively clean rivers

Relatively clean rivers (Radioactive/Import Gibert)


Parfois, en creusant un trou pour construire un parking, on découvre une vieille bombe à désamorcer ou une collection d'amphores antiques à épousseter. Une soudaine résurgence du passé qui, au gram dam des entrepreneurs, retarde un peu les travaux d'avènement du futur (à supposer que le futur soit un parking). On ne sait pas où le label anglais Radioactive est allé creuser pour dénicher Relatively clean rivers, ni s'il faut le tenir pour une bombe ou un vestige. Vestige, car il s'agit de l'album éponyme, sorti en 1975, d'un vrai faux groupe californien (en fait l'œuvre d'un certain Phil Pearlman). Bombe, car la rareté a rendu culte cet objet 100% psychédélique et donc indispensable cette réédition. D'abord parce qu'elle témoigne du déclin d'une utopie : le flower power égare ici ses derniers pétales avec panache. Ensuite parce que RCR dévoile une inspiration foisonnante, sans pour autant tomber dans le piège du bouillon cosmique propre au cousinage du genre avec le rock progressif. Cousin du Grateful Dead et du Neil Young de Harvest, il balaie tout un pan du psychédélisme californien, trempant de solides racines country à la Flying Burrito Bros, parfois acid comme les Seeds, dans les eaux orientalisantes (et relativement propres) du Gange. À la fois daté et hors du temps, Relatively clean rivers est une bulle de calme avant la tempête punk qui dès l'année suivante viendra de l'Est, boire au goulot des amphores, et faire péter la bombe du No Future à la face fleurie des hippies... SD


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PETRA JEAN PHILLIPSON