Le Nouveau monde

TERRENCE MALICK / Metropolitan vidéo


Sévèrement critiqué dans ces colonnes à sa sortie, il est bon de rectifier le tir sur ce film essentiel de Terrence Malick. Le DVD permet de goûter à nouveau la force de sidération que procure cette symphonie d'images et de sons doublée d'un sens du romanesque que l'on n'attendait pas de la part du cinéaste. Car si Malick reprend ses principaux effets de signature (louange panthéiste à la nature, voix-off, rencontre de la civilisation et du primitivisme), il en densifie considérablement les enjeux. Ce qui se joue ici n'est pas la destruction d'un monde par un autre, mais ce moment où les deux se regardent avec admiration, essayent de se comprendre et de s'apprécier dans leurs beautés respectives. Dans la première partie, le conquistador incarné avec candeur par Colin Farrell se laisse happer par l'Indienne sublime qui lui rend la virginité de son regard. Malick le contemplatif est alors à son sommet, sa caméra en apesanteur, le montage prenant des libertés inouïes avec la grammaire classique. Dans la deuxième partie, c'est l'Indienne qui va se couler dans le moule de la civilisation occidentale, sans regret et même avec une certaine joie, découvrant l'amour romanesque à défaut de vivre le grand amour tellurique. Et là, c'est un Malick inédit qui surgit, capable de considérer sans le blâmer l'homme dans ce qu'il a de plus terrestre, lesté par le poids de la vie en société. Ce dernier acte conserve cependant la beauté absolue qui imprime tous les plans du Nouveau monde, un film qui redonne simultanément confiance dans l'homme, le monde et le cinéma. CC


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DJ Mehdi