JOANNA NEWSOM

Ys / Drag City/Discograph


Imaginez Laura Ingalls dévalant la colline les tresses au vent, une harpe gigantesque sur les épaules. Ajoutez-y une touche freak façon Délivrance et vous obtenez Joanna Newsom : minois de sauvageonne en robe de squaw, enfance dans une ville fantôme à la Deadwood et, surtout, une voix venue d'ailleurs, quelque part entre Kate Bush et Björk conviées à un goûter de la Carter Family. Sur son premier album, The Milk-Eyed Mender, elle psalmodiait depuis sa chambre de fillette des comptines dérangées pleines d'animaux fabuleux, étirant les cordes de sa harpe en pluies acidulées. Avec Ys, Joanna l'autiste sort au grand air, abandonnant le format classique de la ritournelle pop-folk (3 minutes, douche comprise) pour l'épopée en grande pompe (55 minutes pour 5 chansons à peine). Ici, sa harpe caracole toujours, mais dans le tourbillon d'un orchestre symphonique ivre des arrangements du grand Van Dyke Parks. Comme sur l'homérique Onky Skin : 17 minutes d'un fabliau dylanien dont la complexité mélodique, les cascades de cordes et le raffinement baroque rappellent autant Walt Disney que les albums vénéneux de Scott Walker. Sans parler de ce finale à ébouriffer un opossum... Joanna Newsom est une revanche sur toutes les Laura Ingalls du monde. Celles qui ont dénoué leurs tresses pour s'en faire un chignon. Celles qui sont devenues institutrices et ont épousé Almonzo au lieu de courir la prairie, rêves en bandoulière. S.D.


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Awesome ! I fuckin'shot that !