Beirut

Gulag Orkestar (Ba Da Bing/Differ-ant)


Tout commence comme dans un film d'Emir Kusturica. Et pourtant, cette fanfare balkanique qui souffle la mélancolie des peuples de l'Est est en réalité le fait d'un seul homme, Zach Condon. Comme son nom l'indique, Condon n'est pas un jeune prodige (19 ans !) venu de Belgrade ou d'on ne sait quelle contrée orientale convalescente, mais un Américain qui, comme le chantait Boris Vian, possède l'âme slave. S'il a probablement contracté le virus des trompettes au contact de ses voisins mariachis (il a grandi à Albuquerque, Nouveau-Mexique), c'est bel et bien vers les gitans magnifiques d'Underground et Chat noir, chat blanc que sa musique a choisi de regarder. Quasiment seul, Condon superpose les instruments (trompettes, ukulélé, piano, accordéon, percussions, etc.) pour donner naissance à de superbes vignettes aux architectures évoquant souvent celles de notre Yann Tiersen national. Parenté frappante sur le très beau Mount Wroclai dont l'intro à l'accordéon rappelle immédiatement le fameux Monochrome tiersenien, à la différence près que Monsieur Beirut n'a lui pas besoin d'inviter qui que ce soit pour chanter, sa voix étant sans doute l'un des plus beaux instruments de sa panoplie. De la famille des lyriques, versant Andrew Bird ou Rufus Wainwright, elle incarne de façon vibrante ces mélopées au souffle épique. Et comme si ça ne suffisait pas, le petit Zach se fend de deux pièces minimalistes poignantes (un modeste synthé et deux, trois bricoles) qui témoignent de son authentique talent pop. On ne sait pas ce que nous réserve Beirut pour la suite, mais la concurrence a de quoi se faire du souci. EA


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"Arrested Development" saison 1