Sandrine Piau

In furore, Laudate pueri e concerti sacri de Vivaldi Naïve


Même enrhumée, Sandrine Piau nous avait fait rêver lors de son récital Haendel l'an dernier à l'Opéra de Lyon (il existe sur CD, chez Naïve, sans les microbes). La revoilà, jetée pour la première fois à corps perdu dans les eaux mouvantes de ce vénitien de Vivaldi, et le résultat est au-delà de toute attente. Jamais dans le bêlement virtuose, pas plus que dans les gimmicks baroques dévitalisés (ces voix droites définitivement métallisées), elle livre une incroyable sensation de facilité, aussi à l'aise dans le feu d'artifice vocal du début d'In Furore que dans le chant poignant de plusieurs arias qui touchent au sublime (le Gloria avec flûte du Laudate pueri, entre autres). Souple et légère, agile et agitée comme cette musique atmosphérique toujours renouvelée, elle est imprévisible et réserve des trésors de nuances. D'autant que la piété des motet et psaume regroupés ici n'est qu'une divine comédie, un prétexte à l'extase pour ce grand hédoniste de Vivaldi (écouter l'Excelsius, qui "surpasse la hauteur des cieux", et mourir, mais pas avant la fin du disque). Violons saccadés qui remontent par bouffées en ouverture du Laudate pueri, ballet de violons suspendus comme un paysage en attente de saison ("du soleil jusqu'au couchant"), utilisation de la pulsation à nul autre pareil... Des ballades lacrymales jusqu'aux saillies en furie, tout est vivant chez Vivaldi, changeant comme le climat et impétueux comme la fougue de ce génie de la musique d'ambiance, dont vous trouverez en prime plusieurs pages instrumentales assez rares. Une merveille. LH


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