Traversée - Carnets XII

Louis Calaferte Journal (L'Atpenteur / Gallimard)


Dans la bibliothèque idéale de Louis Calaferte, une large place est réservée aux journaux d'écrivains. D'Amiel à André Gide en passant par Kafka ou Jules Renard, il s'est toujours nourri de l'écriture intime, a toujours admiré cet exercice d'échauffement spirituel permanent, cette analyse quotidienne des sensations, des pensées et des connaissances qui rend l'homme vivant. Dès 1956, il s'astreint à cette discipline intellectuelle et esthétique en marge du développement de son oeuvre (rappelons qu'il est l'auteur de romans, de recueils poétiques, de nouvelles, de théâtre...). La parution du douzième tome de son journal nous confirme qu'il mérite d'être rangé auprès de ses chers prédécesseurs. Avec Traversée, on découvre un Calaferte de plus en plus diminué par la maladie, qui garde pourtant son insatiable appétit de lecture et de création. Celui qui se définissait lui-même comme un anarchiste mystique n'a rien renié de ses idéaux. Il nous régale de ses émotions de lecteurs, de ses aversions aussi, dont la plus caustique est sans doute celle qu'il porte au "clown Cocteau". Il nous foudroie souvent par son sens de l'aphorisme, du mot juste et de la formule fulgurante. Il nous émeut par l'amour qu'il porte à G., sa compagne, et à la quiétude qu'elle lui procure malgré son irrépressible angoisse à vivre. Il nous impressionne, enfin, par sa farouche indépendance et son intégrité sans compromis. Louis Calaferte est mort en 1994. Ces journaux sont datés de 1990. On prie pour que quelque part, dans un tiroir, il y ait encore quelques-uns de ces précieux carnets... YN


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