La Vengeance est à moi/Eijanaika

SHOEI IMAMURA (MK2 vidéo)


Dans l'histoire du cinéma japonais, il est grand temps de trouver la juste place de Shoei Imamura. Aujourd'hui septuagénaire, il aura fait le gros de sa carrière assez tardivement, et n'a pas bénéficié de l'influence des grands maîtres (Kurosawa, Mizoguchi, Ozu et Naruse), mais aura navigué avec les "modernes". Avec Oshima, par exemple, il partage une certaine obsession pour le sexe, dans une version plus joyeuse cependant, ainsi qu'une manière bien à lui de critiquer son pays. C'est ce qu'on découvre avec ces deux films réunis dans un beau coffret un rien trop fastueux (quatre DVD alors que l'ensemble pouvait tenir facile sur deux disques...), mais comme d'habitude avec MK2 d'une grande intelligence éditoriale. La Vengeance est à moi est le récit déconstruit de l'errance d'un serial killer dans les provinces japonaises : la violence extrêmement crue du film assure aujourd'hui son incroyable modernité, même si Imamura, à la différence de certains cinéastes américains, cherche à débusquer les causes qui conduisent à ce comportement criminel (sans les excuser cependant). Quant à Eijanaika, il s'agit d'une fresque picaresque qui montre la fin de l'ère des Shoguns, mais du point de vue d'un petit peuple plein de vie et d'espoir, avec un anti-héros complètement con mais diablement attachant. Il n'est pas interdit, à la vision de ce film splendide et épique, de penser à Fellini, notamment celui de Amarcord, tant la vision du cinéaste privilégie l'anecdote truculente au réalisme historique, le Japon d'en bas à celui des Seigneurs et leur pouvoir fatigué.CC


<< article précédent
Doggy bag