Profit

JOHN MACNAMARA (Paramount)


Coincé entre la première grande série moderne (Twin Peaks) et l'apparition de la nouvelle vague HBO, Profit est à la fois une série culte et maudite. En 1995, les diffuseurs de la Fox acceptent de produire la première saison de ce Richard III au pays du libéralisme, et se rendent compte au quatrième épisode qu'ils ont créé un monstre. Ce monstre s'appelle Jim Profit, recruté par une puissante société américaine dont il gravit les échelons en éliminant tous ceux qui se mettent en travers de sa route. Manipulateur, violent, amoral, Profit est le premier héros entièrement négatif de l'histoire télévisuelle. Son passé torturé (il a vécu dans un carton, comme un animal, avec comme seule ouverture... la télévision) n'est même pas une excuse... Ce qui est sidérant ici, c'est que MacNamara et ses scénaristes portent tous leurs coups sur le veau d'or qui les nourrit : Profit déteste la télé, il fait tomber les autres employés comme s'il jouait à un jeu vidéo, il énumère en voix-off tous les grands principes libéraux pour en faire des justifications à son comportement psychopathe... Surtout, Profit est un vrai "génie du mal" : il est doté d'une intelligence machiavélique qui lui permet d'avoir cinq longueurs d'avance sur tous les autres personnages. Mais à aucun moment il ne fera preuve de générosité. Pas de sentiments, pas de remords : bienvenue dans le monde sauvage du capitalisme à visage inhumain (Adrian Pasdar, qui joue Profit, a un faux air de Nicolas Sarkozy d'ailleurs !). Dix ans après, malgré son esthétique un peu datée, Profit n'a rien perdu de sa pertinence.CC


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La Vengeance est à moi/Eijanaika