Lunar Park

BRET EASTON ELLIS (Robert Laffont)


Pour son cinquième roman, Ellis tente le tout pour le tout et se transforme en l'un de ses propres personnages de fiction. Coup littéraire d'un auteur en panne d'inspiration ? Après le chaos total de son Glamorama (un grand livre raté), les fans désarçonnés en seront pour leurs frais dès les premiers chapitres. Un auteur à succès nommé Bret Easton Ellis, ravagé par l'alcool, la came et les tournées promo, se voit offrir une seconde chance par son ex-compagne. Direction la banlieue pavillonnaire, la vie de famille avec ce fils de 11 ans qu'il n'a jamais connu ni vraiment désiré. Cette brillante intro posée, on ne cherchera plus tellement à démêler le vrai du faux, l'auteur fait basculer son double en plein cauchemar à la Stephen King. Les enfants du quartier disparaissent, la maison se transforme, le père décédé d'Ellis lui envoie des e-mails... Mais l'exorcisme affiché de ses démons ne sauve pas Lunar Park d'un certain marasme narratif, à peine moins contrôlé que celui de Glamorama. Les scènes se répètent inlassablement, le jeu de miroirs réfléchit en creux, et la résolution des intrigues laissera le lecteur sur sa fin. Mais l'auteur lui ménage une superbe conclusion, d'ultimes pages justifiant à elles seules la lecture du roman. C'est toujours ce qui fait le prix de cet auteur : une arrogance évidente, brillamment insupportable, cachant derrière ses mécanismes (désormais rebattus) une sincérité des plus désarmantes. FC


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SYLVIE GERMAIN