La Cité des hommes

FERNANDO MEIRELLES (MK2 Vidéo)


Il n'y aura bientôt plus qu'en France où l'on sera incapable de faire des séries télé correctes ! Voyez La Cité des hommes, adaptation par Fernando Meirelles (et ses petits camarades tous aussi brillants que lui) de sa Cité de Dieu en deux saisons de 4 et 5 épisodes, et vous constaterez que le Brésil a en tout cas frappé un grand coup. Comme dans le long métrage d'origine, la série s'attache à suivre les tribulations de deux gamins pauvres et sans réel avenir dans une favela cradingue de Rio. Magie de la télé : d'une saison à l'autre, les deux acteurs grandissent vraiment, leurs préoccupations changent (survivre et échapper à la loi de la rue dans la première, "pécho" des filles mais aussi prendre conscience de la réalité politique de leur pays dans la seconde) et leurs destins s'écartent un peu (mais l'amitié reste, sans jamais que la série ne la souligne didactiquement). Chaque épisode est une merveille de drôlerie et une foutue leçon d'écriture et de mise en scène. Le style éclaté, speed et virtuose de La Cité de Dieu est repris et complété ici, puisqu'en plus de la batterie de trucs pour faire exploser l'image (écrire dessus, multiplier les split-screens, les coupes sauvages, les apartés, les changements de format), se glisse un regard documentaire frontal et saisissant. Audace incroyable pour une série télé : les acteurs quittent parfois leur personnage et redeviennent ces authentiques enfants brésiliens perdus dans une cité où le crime, la drogue, la misère et la corruption ne font même plus débat. Ils en parlent face caméra, rappelant au passage la vraie fonction de la télé : pédagogique, ouverte et innovante. La Cité des hommes est tout ça, mais c'est surtout un plaisir de spectateur.CC


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