Isaac le pirate (5) : Jacques

CHRISTOPHE BLAIN (Poisson Pilote/Dargaud)


Au commencement, Isaac Sofer était peintre. Embarqué sur un bateau pour les Amériques, il s'est fait pirate, a traversé des contrées glacées, en a pris plein la gueule et a enfin retrouvé Paris où il s'est révélé pickpocket de génie. Dans ce cinquième tome, le voilà qui renoue avec son art et sa muse de toujours, Alice. Tout du moins, tente-t-il de la retrouver. Cette quête, croisée avec l'idylle clandestine entre son acolyte Jacques et une dormeuse aux élans voluptueux troublants, place indéniablement ce nouvel opus sous le signe de la passion amoureuse ; envolée ou inaccessible. Après les aventures et les péripéties "à l'ancienne", l'heure est à l'intime et aux tourments intérieurs, même s'il faut bien reconnaître que chez Blain les deux ne sont jamais très éloignés. Comme d'habitude, le romantisme et la lubricité la plus triviale font bon ménage au sein de dialogues toujours aussi brillants. Un sens du raffiné et du vulgaire, du subtil et du grossier, que le trait de l'auteur explore comme jamais dans des cases plus amples qui font honneur à son statut de dessinateur parmi les plus doués de sa génération et mettent en valeur les sublimes couleurs de Walter & Yuka. Page après page, année après année, Christophe Blain est tout simplement en train de poser les jalons d'une œuvre maîtresse évoquant le meilleur de la littérature, du cinéma ou des arts graphiques et réussissant comme celles de ses maîtres Philip Roth ou Clint Eastwood le mariage de passion entre divertissement et radiographie de l'âme humaine. Respect.EA


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