Le Village
publié dans Cinéma par le Mercredi 30 mars 2005
M. NIGHT SHYAMALAN (Touchstone Home Entertainment)
Vrai auteur ou simple faiseur ? Invention d'une forme, d'un style et d'un monde ou déclinaison sans âme d'un système narratif s'évidant film après film de ses enjeux les plus forts ? Avec Le Village, Shyamalan jouait de toute évidence son va-tout : ça passe ou ça casse. À revoir le film en DVD, on sent à quel point l'enjeu pour le cinéaste est d'opérer une transformation de son cinéma sans mettre en péril ses fondations, celles qui ont fait son succès : coups de théâtre et renversements de perspectives doivent ici se marier avec une non-intrigue par excellence, l'histoire d'amour entre une aveugle et un bon gars presque simplet dans sa bravoure modeste. Dégagé de ses effets de surprise, le film se montre comme un cas particulièrement retors de cinéma excessivement théorique (qu'est-ce qu'une reconstitution historique ? Comment construire un conte ? Quelles sont les règles pour rendre un univers crédible aux yeux du spectateur ?) et parfaitement incarné (ce qui est relativement nouveau chez Shyamalan). On pourra ainsi s'amuser à comparer Le Village avec La Vie aquatique, ou comment deux des meilleurs cinéastes "indépendants" (ils bossent tous deux, en toute liberté, pour Disney) font le grand saut dans l'inconnu avec une certaine inconscience, se libérant des impératifs du suspense ici (Shyamalan) ou de la vraisemblance là (Anderson).CC