Bon vent sur les Rencontres

Profitant de la belle éclaircie 2004-2005 sur le cinéma français, le festival Drôle d'endroit pour des rencontres propose une édition dense et pertinente aux Alizés. CC


Qui l'eût cru ? Alors que depuis des années, les lamentations étaient de mise sur la médiocrité de la production hexagonale, voilà que les cinéastes français se sont réveillés en 2004, et se sont mis à faire des bons films. Où va le monde, j'vous l'demande ? Bon, le tableau n'est pas idyllique, et les daubasses aussi ont pullulé, mais le niveau moyen s'est considérablement élevé. Excellent baromètre de cette santé retrouvée, Drôle d'endroit pour des rencontres propose une édition 2005 courte (5 jours et une dizaine de longs-métrages) mais plutôt bien fréquentée. Bon point pour commencer : le festival accueillera le meilleur film français de l'année dernière, accompagné de son réalisateur (jeudi 27 à 20h30). Un mois après sa sortie, Rois et reine d'Arnaud Desplechin n'a pas disparu des mémoires. Mieux : le succès du film et le besoin compulsif d'y revenir, offrent à Desplechin une lumière méritée (et bien plus pertinente que l'abjecte querelle lancée par Marianne Denicourt). Rois et reine, tragi-comédie de notre époque, est l'aboutissement du projet mené par Desplechin depuis ses débuts : montrer des personnages issus d'une vie plus que quotidienne comme des héros shakespeariens ou des Dieux antiques, puiser dans l'ordinaire ce qu'il y a d'extra-ordinaire, par la force d'un regard cinématographique. Pas besoin d'en rajouter dans le style ou la théorie : ce cinéma-là est concret, brutal, trivial. Il est passionnant.Mitterrand, la boxe thaï, le glamourEn écho à cette sublime réussite, Le Promeneur du Champ de Mars, nouveau film attendu de Robert Guédiguian (qu'il présentera le samedi 29 à 14h), parcourt le chemin inverse. D'abord, l'extraordinaire : Mitterrand (sous les traits de Michel Bouquet), le plus fascinant et controversé des Présidents français. Ensuite, l'ordinaire : ses conversations avec un jeune journaliste, évocation d'une vie tumultueuse et d'une mort annoncée, retour sur terre de celui qui regardait vers le ciel de la postérité. Comment Guédiguian, cinéaste de gauche, a-t-il géré toutes les contradictions du personnage ainsi que les nécessaires aménagements fictionnels et dramaturgiques que la fiction engage ? On ne le sait pas encore, mais quoi qu'il en soit, il est heureux que le cinéma français s'intéresse enfin à son Histoire récente, sans la travestir derrière de transparents pseudonymes. Xavier Durringer, dont on n'avait pas de nouvelles depuis son excellent J'irai au paradis car l'enfer est ici, choisit lui l'exil pour son troisième long-métrage. Chok Dee va suivre les traces d'un ex-détenu, devenu boxeur thaï en prison, et qui fait le trajet jusqu'à la Thaïlande pour exercer son art. Durringer présentera le film le vendredi 28 à 21h. Enfin, Drôle d'endroit pour des rencontres se terminera avec une soirée de gala le dimanche 30 : Sandrine Bonnaire inaugurera en personne la salle des Alizés qui porte son nom. Dommage cependant que ce soit avec l'académique Est/Ouest qu'on lui fasse cet honneur, et pas avec le glamour Mademoiselle, son plus beau rôle de ces dernières années.Drôle d'endroit pour des rencontresAux Alizés du 26 au 30 janvier. Programme en page 11.


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