L'Auberge rouge

HONORÉ DE BALZAC (Gallimard/Folio)


Au cours d'un dîner parisien, un "bon gros allemand" nommé Hermann se souvient entre la poire et le fromage avoir croisé dans une prison allemande un étrange accusé français, Prosper Magnan. Séjournant quelques années plus tôt à L'Auberge rouge aux côtés d'un riche négociant, ce soldat français s'était "enivré moralement par des raisonnements assassins" (du pur Balzac !) : en cherchant le sommeil, il imagina tuer le négociant pour profiter de sa fortune. Torturé par ses pensées immorales, Prosper Magnan finit par sortir prendre l'air dans la nuit. À son retour, dans l'obscurité, il ne voit pas que le négociant a été décapité. Il se retrouvera condamné pour le meurtre dont il avait rêvé... Si vous associez encore Balzac aux sévices scolaires que vos profs de français vous ont fait subir avec Le Père Goriot ou Eugénie Grandet (qui valent largement une relecture solitaire), voilà une courte nouvelle qui vous fera découvrir une des mille facettes de ce génie du réalisme de mauvaise foi. Quelques années avant les Histoires extraordinaires d'Edgar Poe, Balzac explore déjà les pistes de ce qui deviendra le roman noir. Culpabilité de l'innocent, atmosphère fantastique de l'Allemagne romantique, cupidité et revanche sociale : tous les ingrédients sont déjà en germe dans ce précipité criminel que Folio a le bon goût de publier à part pour la modique somme de 2€. Un bon classique pas cher vaut parfois mieux qu'un roman plein tarif d'un scribouillard contemporain... LH


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