DAVID LYNCH

INLAND EMPIRE/Twin Peaks, saison 1


Studio Canal/TF1 vidéoLa sortie quasi-simultanée de son dernier film et de la première partie de sa grande œuvre télévisuelle permet de mesurer ce qui, en une vingtaine d'années, représente la révolution David Lynch. Dans Twin Peaks, le classicisme hitchcockien de la mise en scène est progressivement troué par des détails tordus et des figures étranges, manifestations d'un monde parallèle qui aurait besoin de nombreux passeurs ; dans INLAND EMPIRE, ces deux mondes s'interpénètrent constamment, et les frontières sont de plus en plus discrètes. Seule la mise en scène, furieuse, souveraine, archi-contemporaine, orchestre le basculement d'un plan à l'autre, du rêve à la réalité, du passé au présent. Dans Twin Peaks, le portrait de femme en crise se construit au passé par le témoignage de ceux qui l'ont connue. Mais Dans INLAND EMPIRE, un seul personnage, celui de Laura Dern, incarne avec le même visage toutes les figures de la féminité, mère éplorée, épouse adultère, femme sexuellement libérée... Là où la télévision était un champ d'exploration pour multiplier les intrigues et recréer une ville entière avec tous ses habitants, la vidéo numérique offre à Lynch un autre laboratoire : la possibilité de faire cohabiter dans un même plan plusieurs régimes de représentation, plusieurs strates de sens et de sensations. La durée exceptionnelle (8 heures dans Twin Peaks, 3 dans INLAND EMPIRE) sont le même signe de ce travail jamais achevé et pourtant incroyablement cohérent. On pourrait en parler des heures - et c'est peut-être ça, la vraie révolution lynchienne !CC


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