Philip Roth

Un homme


GallimardPlus les années passent, et plus Philip Roth semble se concentrer sur l'essentiel, resserrer son projet romanesque, dépouiller son écriture, se rapprocher de l'os. Son dernier roman, comme le précédent, La Bête qui meurt, est un livre bref et tendu qui aborde de front les obsessions d'un écrivain hanté par la vieillesse, la déchéance des corps, la souffrance, la maladie et la mort. Un homme s'ouvre sur les obsèques d'un personnage qui ne sera jamais nommé (Everyman, le titre anglais, montre l'anonymat et l'universalité du héros) et se referme sur sa disparition, suite à une énième intervention chirurgicale. Entre ces deux extrémités, Roth égrène la vie ordinaire d'un homme comme les autres : son enfance auprès de son bijoutier de père, ses trois mariages, ses relations conflictuelles avec ses fils, l'adoration qu'il éprouve pour sa fille, mais aussi ses maîtresses, sa carrière, ses collègues, et sa retraite dans une maison spécialisée où cet ex-publicitaire s'adonne à la peinture. Et puis, surtout, ses maladies, le déclin inexorable de son potentiel physique, l'effacement du désir et la nostalgie de l'exultation du corps, la souffrance qui devient l'affaire principale de sa vie et la mort qui s'impose. Animé par une écriture aride et dénuée de toute sensiblerie (voire de sensibilité), ce petit livre éprouvant, d'une froideur clinique, d'un style lapidaire oscillant entre distance et empathie, dégage une intensité absolument bouleversante. YN


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Pascal Brutal, tome 2 : Le mâle dominant