Smiley Face

de Gregg Araki (ÉU, 1h25) avec Anna Faris, Adam Brody...


De son propre aveu, Araki avait besoin d'un projet plus "léger" après son bouleversant Mysterious Skin. Il se livre ici à un exercice de style caractéristique de la comédie américaine contemporaine (le stoner movie, ou film de défonce), prétexte pour développer un style de mise en scène ludique, dont le côté immédiatement jouissif dissimule l'inanité manifeste (mais pas dommageable). Jane, aspirante actrice et authentique glandeuse, émerge d'un trip au space cake en haut d'une grande roue, un exemplaire du Manifeste du Parti Communiste entre les mains. À la question de savoir comment elle en est arrivée là, le film répond avec un art consommé de la digression, de la facétie visuelle désuète, ou d'un hilarant humour confrontant les points de vue de Jane et ceux des personnes qui l'entourent. Il se dégage de ces péripéties, inégales sans être ennuyeuses, l'impression d'une certaine distance dans le regard porté par Araki sur ces personnages. Il revient ici aux archétypes caricaturaux de Doom Generation ou Nowhere, la sublimation du spleen post-adolescent en moins. Ses héros, jusque dans les plus poseuses de leurs attitudes, ne souhaitaient rien tant que sortir des schémas sociaux auxquels on les condamnait. Dans Smiley Face, ces jeunes rebelles ont (à peine) grandi, et sont rentrés dans le rang, chacun à leur façon. L'ouragan Jane a beau s'immiscer dans leur routine, rien se changera véritablement pour autant. Et la lapidaire conclusion du film de résonner d'un fatalisme inattendu de la part de Gregg Araki ; ce point à la ligne laisse franchement perplexe, mais ne tarit en rien l'affection profonde qu'on est en droit de porter à cette œuvre mineure. FC


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