À plein tubes

Panorama / La Biennale d'art contemporain est évidemment l'événement phare de la rentrée. Mais dès le mois d'octobre, d'autres expositions importantes occuperont les cimaises des musées lyonnais... Jean-Emmanuel Denave


Crayon à la main, le Musée des Beaux-Arts esquisse une vaste anthologie du dessin sous l'angle du plaisir (12 octobre-14 janvier)... Oui, le plaisir, cette notion un peu oubliée parmi les sphères artistiques au profit du concept, de la théorisation à outrance, du post-modernisme voire du nihilisme. «L'art du dessin doit son attrait à une naissance renouvelée, une invention continuée, une levée - on voudrait dire, un enlèvement, une enlevure... Et avec elle, tout art doit son plaisir à un désir lancé sur des traces sans fin», écrit Jean-Luc Nancy, à qui le musée a donné carte blanche pour cet événement. Une idée lumineuse tant on peut considérer Jean-Luc Nancy comme l'un des plus grands et des plus stimulants philosophes français vivants. Nancy se penche notamment sur le rapport complice du dessin au corps et décline tous ses autres aspects essentiels : geste, touche, matière, ouverture, inachèvement... Le Plaisir au dessin sillonnera ainsi l'histoire de l'art, du XVIe siècle à nos jours, avec une sélection de 150 œuvres signées Michel-Ange, Raphaël, Ingres, Delacroix, Seurat, Rodin, Picasso, Matisse, Miro, Orozco... Keith Haring, une légende
Le Musée Paul Dini de Villefranche-sur-Saône nous fera quant à lui découvrir l'œuvre méconnue de Jean Puy (du 14 octobre au 10 février), peintre né à Roanne en 1876 et décédé en 1960, qui aimait les paysages autant que les femmes nues. Soixante-dix de ses toiles seront mises en regard avec des œuvres de ses illustres amis fauves : Matisse, Marquet, Manguin et Camoin...
Petit bond vers le futur et l'art contemporain : après le succès phénoménal de l'exposition Warhol en 2005, le Musée d'art contemporain jouera un nouveau coup de poker en février 2008 avec une grande rétrospective consacrée à Keith Haring. Un artiste au destin devenu légende : tout petit déjà il consomme moult drogues et alcools en écoutant Aerosmith, touche un peu à toutes les disciplines artistiques et prend bientôt la rue et le métro comme lieux d'expression. Il se fait arrêter à de nombreuses reprises par la maréchaussée, fréquente le milieu underground new-yorkais (Warhol, Burroughs...) et meurt prématurément du sida à 31 ans. Il n'en fallait pas plus pour que le marché de l'art s'empare de la bête et de son fameux «bébé lumineux» (motif récurent chez Haring) pour lancer sa nausée spéculative quand l'artiste déclarait «ne pas faire de différence entre une œuvre que je peins dans le métro et une autre que je vends mille dollars». On en oublierait presque que Keith Haring est un grand artiste qui a élevé le graffiti au statut d'art à part entière, soufflé sur ses toiles et dans l'espace urbain son éclatante et fourmillante palette, croisé le fer entre Eros et les pulsions de mort... On se réjouit déjà de pouvoir le (re)découvrir à Lyon.


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«LE chien des années 2000»