«La gendarmerie est un humanisme»

Morceaux choisis / Michel Houellebecq est «la» célébrité invitée à la Biennale d'art contemporain 2007. Voici quelques extraits où ses personnages de fiction s'expriment sur l'art et la culture... Fragments sélectionnés par JED


Les Particules élémentaires
Bruno : «Sous couvert de performances artistiques, les actionnistes viennois tels Nitsch, Muehl ou Scharzkogler s'étaient livrés à des massacres d'animaux en public ; devant un public de crétins ils avaient arraché, écartelé des organes et des viscères, ils avaient plongé leurs mains dans la chair et le sang, portant la souffrance d'animaux innocents jusqu'à ses limites ultimes».Plateforme

Michel : «J'ai assisté à bien des expositions, des vernissages, des performances demeurées mémorables. Ma conclusion, dorénavant, est certaine : l'art ne peut pas changer la vie. En tout cas pas la mienne».

«C'est ça la culture, c'est un peu chiant, c'est bien ; chacun est renvoyé à son propre néant».

«Il avait conscience de l'existence d'un secteur culturel, une conscience vague mais réelle. Il devait être amené à rencontrer toutes sortes de gens, dans sa profession ; aucun milieu social ne pouvait lui demeurer complètement étranger. La gendarmerie est un humanisme».La Possibilité d'une île

Vincent : «Schématiquement, tu as trois grandes tendances. La première, la plus importante, celle qui draine 80% des subventions et dont les pièces se vendent le plus cher, c'est le gore en général : amputations, cannibalisme, énucléations, etc..../...
La deuxième c'est celle qui utilise l'humour : tu as l'ironie directe sur le marché de l'art, à la Ben ; ou bien des choses plus fines, à la Broodthaers, où il s'agit de provoquer le malaise et la honte chez le spectateur, l'artiste ou les deux en présentant un spectacle piteux, médiocre, dont on puisse constamment douter qu'il ait la moindre valeur artistique ; tu as aussi tout un travail sur le kitsch, dont on se rapproche, qu'on frôle, qu'on peut parfois brièvement atteindre à condition de signaler qu'on n'en est pas dupe.
Enfin tu as une troisième tendance, c'est le virtuel : c'est souvent des jeunes, très influencés par les mangas et l'heroic fantasy ; beaucoup commencent comme ça, puis se replient sur la première tendance une fois qu'ils se sont rendu compte qu'on ne peut pas gagner sa vie sur Internet».

Daniel 1 : «Mais qui songe encore à l'art quand le bonheur est possible ?»


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À plein tubes