Corps et images bougent ensemble

Danse & cinéma / La danse et le cinéma, main dans la main, font quelques sauts et pirouette ensemble. Et devraient nous réserver cette année quelques belles séquences... Jean-Emmanuel Denave


Corps en mouvement, images en mouvement : danse et cinéma font bon ménage à Lyon, celle-là s'inspirant de celui-ci dans plusieurs spectacles notables. Premier événement : la superproduction (Victor Bosch de Notre Dame de Paris et France Télévisions sont dans le coup) de Kirikou et Karaba, comédie musicale adaptée du film d'animation de Michel Ocelot qui en signe le livret. Le spectacle est créé à la Maison de la Danse (du 11 au 23 sept.) et se profile à nos yeux sous forme de gros point d'interrogation : sera-ce un attrape-gogos, une pièce surtout destinée aux enfants, ou bien encore un spectacle vif et emporté grâce à la chorégraphie du talentueux et électrique Wayne McGregor (artiste anglais découvert à Lyon lors de la Biennale de la Danse 2004) ? Mystère ! Et qui va bien pouvoir endosser le rôle de Kirikou, petit bonhomme haut comme trois pommes ? Plus on pense à Kirikou, d'ailleurs, plus on se dit qu'il s'agit, au fond, d'un bien drôle d'objet freudien : un bébé qui s'accouche lui-même, mange seul dès sa sortie du tunnel, court en tous sens comme un dératé, réfléchit plus vite que son ombre, sauve son village, devient adulte en un coup de cuillère à pot... Un hyper-actif celui-là. Ça ne vous rappelle personne ?De Murnau à Billy Wilder
Nosferatu, Tarzan, l'univers des westerns spaghettis, le théâtre d'ombres : tels seront quelques-uns des ingrédients du spectacle de Philippe Decouflé, Sombrero (du 29 sept. au 13 oct.), voyage baroque, drôle et surréaliste à travers le Mexique et l'imagination déglinguée du chorégraphe. Autre très grand moment à la Maison de la danse : la reprise de Péplum de Nasser Martin-Gousset (du 15 au 17 nov.) qui avait fait sensation lors de la Biennale 2006, élu événement culturel de l'année par un illustre quotidien du soir. Avec dix interprètes, trois musiciens, les voix de Liz Taylor et Richard Burton (Cléopâtre et Antoine dans le film célèbre de Manckiewicz qui constitue le fil rouge du spectacle), une grande bouffée de rock et de plastique dionysiaque, Martin-Gousset met en scène et en délire le roman de sa propre vie, filme et danse ses fantasmes comme ses réalités... Sans transition, dans une sorte de faux-raccord acrobatique, on vous conseillera aussi la nouvelle pièce d'Alain Buffard, (Not) A Love Song (aux Subsistances du 20 au 24 nov.). Dans un décor de cinéma noir et blanc, trois danseurs-chanteurs rejouent des scènes de films mythiques (de L'Ange bleu de Sternberg à Sunset Boulevard de Billy Wilder, en passant par Les Demoiselles de Rochefort) et égrènent tout un répertoire rock à la playlist parfaite : Iggy Pop, Joy Division, Lou Reed, David Bowie, PIL... Après le fabuleux, libidineux et noir Les Inconsolés, il semble qu'Alain Buffard soit capable parfois d'humour et de légèreté. Il y sera question aussi, en creux, de solitude et d'absence, rassurez-vous.


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Vollmann, Franzen et les autres