Étonnant Antony

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Un gars, une fille
Garçon manqué, fille refoulée, Boy George possédé par Nina Simone, Roy Orbison prisonnier d'une maison de poupée, impossible de figer l'image d'Antony, carrure de pilier All-Black et visage de fillette. Si son look singulier (napperon sur la tête, chemisier transparent) peut susciter la moquerie, sa voix provoquera dans la minute suivante des frissons en cascade. Et c'est finalement Laurie Anderson qui aura à son égard le mot le plus juste : «sa voix hors norme contient toutes les émotions du Monde». Et plus encore. Banhart Family
L'indispensable compilation Golden Apples of the Sun initiée par Devandra Banhart comme manifeste de la scène weird folk (Joanna Newsom, CocoRosie), a fait d'Antony un membre à part entière d'un clan néo-psychédélique le présentant régulièrement comme le «meilleur d'entre nous». S'il en partage les excentricités et le goût du déguisement, il s'en éloigne considérablement quand il s'agit de musique : influences à mille lieux du naturalisme folk (Marc Almond, Alison Moyet) et compositions, certes weird, mais à identités multiples : jazz hermaphrodite à la Jimmy Scott, soul pleureuse ou pop à l'eau de rose gratinée d'épines. Label underground
Un freak comme Antony aurait largement eu sa place dans le bestiaire warholien de la Factory. À jouer les bêtes de foire condamnées à attendre à l'ombre son «glorieux quart d'heure». Comment expliquer alors que tout ce que la branchitude compte de roitelets (Björk, Rufus Wainwright...) en ait fait une «favorite» si courtisée ? La réponse s'appelle Lou Reed, lui-même ancien locataire de l'art souterrain et découvreur du phénomène. Les deux partagent le goût des histoires scabreuses et cet art unique de les populariser. Personne en effet n'était parvenu depuis Loulou à faire l'unanimité avec des chansons de la trempe de Hitler in my Heart ou Fistful of Love, histoire d'amour fou sur fond de tabassage domestique.

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