Free your ass...

Musique / La déesse du r'n'b Beyoncé est cette semaine à la Halle Tony Garnier, pour éblouir le public de son déhanchement (prophétique) et de ses tubes (atomiques). CC


«Free your mind and your ass will follow...» chantait, en pleine période funk, le Président George Clinton au sein de son Parliament. Pour cet entertainer infatigable, cela s'adressait directement à la communauté noire et fixait un cap dans les priorités : d'abord l'affirmation de ses idées, ensuite l'utilisation désinvolte de ses dons naturels. Aujourd'hui, en 2007, Beyoncé exhibe cet arrière-train qui est un puits à fantasme masculin, et avec lui le monde ne tourne plus de la même façon. «Irremplaçable», dit-elle d'elle-même sur l'un des tubes qui défouraillent l'auditeur à l'écoute de son dernier album, modestement intitulé B-Day ; prophétique aussi, car Beyoncé débarque aujourd'hui sur le sol français pour une tournée brève mais fulgurante. Laquelle de ses armes de destruction massive viendra atomiser vos 45 euros ? Sa musique, rentrée dans la légende avec Crazy in love, cette bombe qui devrait, si la décennie s'achève comme elle a commencé, rester comme LE classique des années 2000 ? Ou ce corps bigger than life, aux proportions extravagantes, qui dégage une telle aura qu'il fait ressembler tout ce qui traîne aux environs à un village de Schtroumpfs ?DreamgirlPendant que l'ancienne Destiny's child faisait la joie des journaux people en affichant sa romance avec la superstar du rap Jay-Z, producteur pimp poussant au cul les perles enregistrées par sa promise, Beyoncé (Knowles) se lançait un petit défi perso : devenir une actrice respectée. Oh, elle avait bien tenté le coup dans le troisième Austin Powers mais, toute Beyoncé qu'elle est, on se souvient surtout du sourire déglingué et des gags ralentis de Mike Myers. Pour Dreamgirls, l'affaire était tout autre : en transparence derrière Deena, chanteuse r'n'b échappée d'un groupe d'amies pour devenir en solo une star fabriquée sur mesure par un producteur-amant douée pour le business, il y avait Diana Ross, les Supremes, la Motown. À moins que ce ne soit l'inverse : derrière la fausse Diana, l'imitation vulgos du groupe culte et la version romanesque du label mythique, il y a peut-être une autofiction peu ragoûtante sur comment Beyoncé a conquis le cœur du public en surfant sur une commercialisation à outrance de la musique black, disco démago hier, r'n'b surgelé aujourd'hui, plantant sur place ses anciennes copines, qui n'auront pas joué longtemps les Survivor. Dans le film, le succès n'est pas la meilleure revanche, mais le refuge des cyniques et des traîtres, des calculateurs et des égoïstes. Aveu tardif et demande de pardon implicite ou acte de naïveté et d'orgueil aveugle ? Elle avait répondu avec le titre de son premier tube de 2006 : Déjà Vu. Oui, la musique de Beyoncé ressemble à plein de trucs, elle n'innove en rien, et peut-être même contribue-t-elle a décérébrer un peu plus une génération d'ados mondialisés... Mais au slogan usé d'hier, Beyoncé répond aujourd'hui : «Free your ass, and your mind will follow...»BeyoncéÀ la Halle Tony GarnierMercredi 30 mai


<< article précédent
«Les effets spéciaux, ce sont les faits»