Une vie(déo) de chiens


Expo / Dans ses nouveaux murs encore bruts de décoffrage, la BF15 présente une bonne petite exposition collective d'art contemporain pur jus. Le décor défraîchi du lieu sied parfaitement à l'amusante «Forêt qui court (dialogues)» de Basserode composée de cinq mannequins hybrides (jambes de mannequins surmontées de branchages synthétiques) folâtrant ici et là, et démultipliés grâce aux miroirs de John Knight disposés contre les murs. Mais ce sont surtout trois oeuvres vidéo qui retiennent l'attention... Garry Hill, passé maître de l'exploration des spécificités de ce medium, a filmé pour Blind Spot une scène de rue à Marseille d'une trentaine de secondes, dilatée ensuite au montage en une vidéo de treize minutes : le temps mais aussi l'espace s'étirent, une tension étrange s'installe entre deux images, le visage d'un vieil homme se donne à voir avec une intensité presque bergmanienne. Le belge David Claerbout joue quant à lui très clairement avec les codes cinématographiques : Le moment se présente d'abord comme un possible remake du Projet Blair Witch avec une forêt de nuit, un halo de lumière au milieu de nulle part et une musique à donner des frissons... puis tout à coup le film d'horreur annoncé bascule dans une séquence totalement incongrue. Enfin, El Gringo de Francis Alÿs impressionne beaucoup : en caméra subjective, l'artiste nous emmène d'abord tranquillement dans un petit village isolé et pauvre du Mexique, et nous croisons ensuite plusieurs chiens errants : ceux-ci s'approchent, deviennent de plus en plus agressifs, aboient et sortent les crocs, sautent sur la caméra, mordent presque le spectateur... Un spectateur qui a réellement le sentiment d'être agressé, gringo plongé dans un déferlement de violence canine et un lieu de désolation. Jean-Emmanuel DenavePrimaverra (Gary Hill, Francis Alÿs, Basserode...) À la BF15, jusqu'au 14 avril


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Cordes raides