Punk nourri au grain


Musique / Parce que ces garçons ont un certain sens de l'humour tordu, on n'avait pas vraiment pris Picore au sérieux lors de la sortie de Discopunkculture, premier album hébergé dans les couveuses fertiles de Jarring Effects. Tout au plus les voyait-on comme des Beastie Boys énervés, des petits blancs nourris au hip-hop et au punk maniant avec le même soin sur scène ordinateurs, guitares et scie sauteuse. Cédric, un des membres de Picore, résume la situation : «Le groupe est hélas très (trop ?) connu pour ses prestations scéniques à base d'outils chipés chez Castorama...» Et voilà qu'arrive sur nos platines leur deuxième opus, L'Hélium du peuple, et on n'a d'un coup plus envie de rire. Le ton est donné dès le premier morceau, France, et son texte glaçant en forme de manifeste no future récité d'une voix blanche sur une musique teigneuse qui sent la rage et le mauvais sommeil. Justement, le morceau suivant s'appelle La Teigne («personne hargneuse, méchante», selon le dico) : c'est bien ainsi que la musique de Picore avance, à coups de barre à mine dans le bruit de fond contemporain, pourfendant consumérisme aveugle, capitalisme sauvage et avachissement généralisé... Fracas industriel, dub inquiet, rap blanc au verbe sec : dans ce chaos de tourments se lève parfois une trompette pleurant des jours meilleurs qui ne viendront peut-être jamais. Même les samples de dialogues rétros ne servent pas de respiration cocasse : Picore met du sens partout, ne baisse jamais les armes et les bras, retourne sans fin au charbon... Les voir faire équipe sur la scène de L'Épicerie moderne avec Dälek, un autre spécialiste du hip-hop qui dérange, n'est pas une surprise. En tout cas, si on lève les bras ce soir-là, ce sera surtout pour lever le poing !CCPicore (+ Dälek)À L'Épicerie Moderne (Feyzin)Samedi 24 mars


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Starlette Johanson