Le monde selon Lise

Classique / La jeune et talentueuse pianiste Lise de la Salle sera à Lyon pour un récital exceptionnel, mercredi 28 février à la salle Molière. Rencontre. Propos recueillis par Dorotée Anar


Vous avez 19 ans et vous sortez prochainement votre quatrième disque. À quel âge avez-vous donné vos premiers concerts ?Lise de la Salle : J'avais 12 ou 13 ans quand j'ai commencé à donner des concerts. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, et même si cela représente une masse de travail énorme, c'est une vie très enrichissante. J'ai beaucoup voyagé, fait de belles rencontres qui compensent les sacrifices que j'ai dû faire. De plus, j'ai toujours été très entourée par ma famille et ma maison de disque, je peux dire que je suis sereine !Pour le récital du 28, vous avez choisi Mozart et Prokofiev. Pourquoi ces compositeurs ?Ce sont deux compositeurs qui me passionnent et comme toujours dans mes programmations, j'ai fait un choix qui a priori peut paraître surprenant. Ce couplage est pourtant très réfléchi et à la cohérence musicale profonde. L'essentiel pour moi est d'ailleurs qu'à la sortie de la salle, le concert soit ressenti comme un ensemble cohérent par le public.Qu'est-ce qui rapproche Mozart et Prokofiev ?Tout d'abord, tous deux ont écrit d'une manière géniale pour le piano. On a également une écriture très claire, chez l'un comme chez l'autre. Une écriture simple dans un sens positif, c'est à dire beaucoup de clarté, de précision : tout est pensé et ordonné d'une manière phénoménale. Le point de départ pour moi, ce sont les contrastes. Chez Mozart, on peut trouver un univers charmant, dansant, joyeux à une mesure, puis à la mesure suivante, c'est la mort de Don Giovanni et toute la tristesse du monde est contenue dans ces notes. Le fait que l'on puisse passer du rire aux larmes en un instant m'a pris aux tripes de manière violente. C'est pareil chez Prokofiev : un moment on baigne dans un univers dur, ironique, sarcastique. Cet univers implacable évoque la révolution industrielle, la machine qui avance et écrase tout sur son chemin... et puis on plonge dans l'univers de Roméo et Juliette, on se laisse emporter par un élan lyrique énorme et on se demande même où il va chercher tant d'amour... La rencontre entre Mozart et Prokofiev était donc évidente pour moi, tous les deux ont la même capacité à passer d'un univers à l'autre, sans aucune transition et c'est cela qui vous scotche sur votre chaise ! Lise de la SalleMozart, ProkofievÀ la salle Molière, le 28 février


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