Poupée de sens


Théâtre / Du sable et une chaise. Assise sur cette chaise, Maryse attend que les spectateurs veuillent bien s'asseoir en chantonnant La Bambola, de Patty Pravo. Sur les genoux, elle a un petit magnétophone où elle a enregistré cette chanson qu'elle connaît par cœur et qui semble lui rappeler sa vie. Pendant près de cinquante minutes, Maryse regarde le public droit dans les yeux et se confie à lui. On a déjà dit tout le bien que l'on pensait de l'écriture dramatique de Serge Valletti. Dans Mary's à Minuit, l'auteur nous propose une plongée dans l'esprit troublé d'une jeune femme. Seule en scène, Maryse raconte les joies et les peines minuscules qui emplissent ses jours, ses rencontres avec «le docteur», l'attente de «Jean-Louis Maclaren», l'homme qu'elle aime et qui viendra la chercher, peut-être un jour. Elise Le Stume, qui met en scène et interprète le personnage titre, choisit de maintenir l'ambiguïté le plus longtemps possible et le spectateur ne comprend pas immédiatement que cette femme s'est construit un univers qui n'existe sans doute que dans son esprit. Toute en retenue, la comédienne use habilement du texte, fait naître les sourires sur les visages et parvient à installer une tension et une émotion qui vont croissantes. Jusqu'au point de rupture ; celui où Maryse devient la «bambola» de la fameuse chanson, une poupée au corps désarticulé qui ne demande qu'à s'offrir mais ne peut tenir debout sans aide. La simplicité du jeu et de la mise en scène est précieuse en ce qu'elle atteint parfaitement son but. Et une fois de plus, le théâtre de l'Elysée se pose comme le découvreur de talents à suivre, de près.Dorotée AznarMary's à minuitAu Théâtre de l'ElyséeJusqu'au 3 mars


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Enfant de poème