Super champion

Musique / Star au Québec, Champion aura mis deux ans pour arriver jusqu'à chez nous et imposer son électro-rock hypnotique à l'esprit large. Premier contact scénique au Ninkasi Kao le 7 février. Christophe Chabert


La France a beau avoir «des valeurs communes sur la liberté et la souveraineté du Québec», il semble évident que ces valeurs s'arrêtent quand on arrive sur le terrain musical. Ah ! quand il s'agit de nous envoyer la première chanteuse beuglante, c'est sûr que l'Hexagone est presque une terre d'asile ; mais pour le reste... Il aura fallu près d'un an pour que le premier Arcade Fire se retrouve chez les disquaires d'ici, et le cas de Champion (Maxime Morin à l'état civil) est encore plus éclairant. Plus d'un Dj a fait importer depuis belle lurette ses productions et en alimentait ses playlists, mais aucune maison de disques n'avait jugé bon de relayer sur le territoire français le succès remporté au Québec par son premier album, Chill'em all. Pourtant, les beats électro, les riffs de guitare et l'anglais chanté par une voix suave et soul ont a priori une certaine faculté à traverser les frontières... Mieux vaut tard que jamais, deux ans après, nous voici enfin en mesure de recevoir ce brillant électron libre dont la musique a de quoi ravir les férus de dancefloor comme les nerds scotchés à leur myspace.Tables et têtes tournantesD'abord Dj réputé à Montréal, Champion se lasse de n'être qu'un acrobate du vinyle (chez lui, on dit des «tables tournantes») et décide de recruter de vrais musiciens et de vraies chanteuses pour monter ce qu'il appelle ses «G-strings» : quatre guitares, une basse et une voix féminine sensuelle. On suppose que les «strings» désignent malicieusement à la fois les dessous et les cordes vocales de la demoiselle, mais aussi les grosses guitares des messieurs, autant d'éléments qui pourraient faire basculer ses compositions dans ce fourre-tout nommé électro-rock. Pourtant, à leur écoute, on y repérera plus d'emprunts à la musique black (la soul, donc, mais aussi le gospel, le reggae ou la world music) qu'au panthéon du rock'n'roll. Même les guitares, souvent travaillées comme des boucles répétitives, ont quelque chose d'africain, notamment sur ce qui constitue le morceau de bravoure de l'album, le bien nommé Die in peace. Sur la longueur, chaque chanson de Champion dégage une euphorie étouffée, une forme de transe hypnotique qui montre l'attachement de leur auteur aux racines de l'électro, tout en cherchant constamment à élargir ses horizons musicaux. Pour son concert bande au Ninkasi, les programmateurs ont eu l'idée pas stupide sur le papier de lui adjoindre le duo en provenance de Septimanie Rinoçerôse, dont la house avec des guitares peinait à décoller jusqu'à ce que la marque à la pomme ne transforme un de leurs morceaux en scie publicitaire pour son fameux baladeur mp3. On a les mécènes qu'on mérite...Champion (+ Rinoçerôse)Au Ninkasi Kao, le 7 février«Chill'em all» (Saboteur/Anticraft)


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