Scènes ouvertes

Musique / Digestion achevée, les scènes lyonnaises peuvent remettre le son et le couvert après un automne très riche. Sur le papier, entre têtes de bois, têtes à claques et têtes de cons, on reste un peu sur notre faim. Reste à juger sur pièce. Stéphane Duchêne.


Bien sûr, le véritable événement de l'année est le passage lyonnais de la tournée Age tendre et tête de bois (Age mûr et jambes de bois, clament les jaloux). Mais le train n'ayant que trop sifflé depuis les yéyés, exit Stone ou Michelle Torr, place à la dionysiaque égérie de Mathias Malzieu, Olivia Ruiz, qui se lance le défi de remplir la Halle Tony Garnier sans écorcher ses genoux en chocolat. Ou à son pote, l'anti-Richard Anthony, Cyrz, dont les ritournelles fines ne parviennent pas à nous lasser. À l'inverse d'un Vincent Delerm, qu'on adore détester et qui viendra compter ses Piqûres d'araignée à la Bourse du Travail, avant que Jeanne Cherhal ne s'y jette à L'Eau, titre de son surprenant deuxième album. Quoi qu'on pense de Miossec (il chante mal, il boit trop, il finira tout maboul comme Eric Charden), il reste un phare (breton) pour la jeune scène française et, dans ses bons jours, un étonnant showman. Double dose, en 2007, la première dès janvier pour la Nouvelle Scène Europe 2, avec le sautillant (et pénible) Cali. Et double dose du très rare Polnareff, qui, entre les fans de ses orfèvreries pop des 60's et ceux de ses tubes couillons des 80's, aura largement de quoi remplir la Halle deux soirs de suite.Bizarreries et rock à la mentheLes passages sur scène d'une Agnès Jaoui hispanisante (ouf, Bacri a été dispensé de castagnettes) ou d'un Deschien chantant (François Morel) devraient combler les amateurs de délicieuses bizarreries, au moins autant que les univers singuliers de Souad Massi et Nosfell. Quant à ceux qui se seront remis de la prestation des brindezingues helvètes les Reines Prochaines aux Subs, ils trouveront bien fade la jolie Ayo, dernier avatar de «l'effet Norah Jones» (delicate and smooth comme un Cloonespresso mais un goût de jus de chaussettes). Rayon hip-hop, outre l'Original Festival du Transbo, c'est maigre en quantité mais c'est que du lourd, Booba, du très lourd, IAM, et du très grand, l'interminable Grand Corps Malade, sensation slam de l'année 2006. Et pour ceux qui préfèrent les hips (hanches) au hip hop, quoi de mieux que le beau corps pas du tout malade de Beyonce ou le caoutchouteux Justiiiiiin Timberlake ? Moins charnelle mais plus pointue, l'électro d'Agoria et Rinôçérôse permettra de veiller jusqu'aux Nuits Sonores. Et voilà qu'à l'orée du printemps, les Anglais débarquent. Car, en dehors de New-yorkais lunatiques (The Rapture), on bouffera surtout du rock à la menthe : révélation galloise (The Automatic), baladin irlandais (Damien Rice), écossais soul(ant) (Paolo Nutini), londoniens proprets (The Servant), londonienne léthale (Petra Jean Phillipson, avec Red) et les restes encore tièdes des mythiques Stranglers. Attendus au tournant, Bloc Party et sa capacité unique à enflammer une salle avec du rock glacé, mais aussi Razorlight, dont l'album clin d'œil aux Cars et Elvis Costello, donne très envie de live. Quant à Kasabian, si leur dance-rock bas du front peut se révéler crispant on ne peut s'empêcher d'aimer chez eux ce petit côté «âge tendre et tête de con» qu'on a toujours envié aux Anglais, nous fils de têtes de bois.


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