Larry et son nombril


Réalisateur / Début des années 90. Après une poignée de commandes impersonnelles pour la télé américaine, Larry Charles prend son envol artistique en incorporant l'équipe scénaristique de la série culte Seinfeld. Le succès public grandissant du show lui assure un défi permanent : dans cette sitcom sur les petits tracas quotidiens d'une bande d'asociaux mesquins, l'inspiration se doit d'être continue, sous peine de lassitude. Ce qui arrivera néanmoins au bout de 18 épisodes... Larry Charles s'embarque alors sur un projet hilarant : The Tick, une sitcom à base de super héros désespérément losers. Faute d'audience, l'aventure tourne court. Las, Larry se rabat sur un projet de fiction co-écrit et interprété par Bob Dylan. Marquant ses débuts à la réalisation, Masked and Anonymous se ramasse une gamelle au box-office en 2003. Mais entre temps, notre homme avait assuré ses arrières en intégrant la glorieuse écurie HBO. Si la chaîne câblée bâtit au fil des années sa réputation sur la production sans cesse renouvelée de séries dramatiques de haute tenue, le créneau comique était squatté par les succès tranquilles de Sex & The City et de Everybody loves Raymond ; jusqu'à l'arrivée de Larry David, co-créateur de Seinfeld. David arrive avec un projet connexe à la série qui fit sa gloire : une fausse autobiographie, mêlant des parenthèses anecdotiques et un constat limite dépressif sur sa carrière. Larry Charles supervise le cahier des charges de Curb your enthousiasm (Larry et son nombril en VF) : un style documentaire, préférant le malaise au comique immédiat. Une connivence permanente avec le spectateur, relayée par des punchlines agressives, des apparitions régulières de guests stars dans leur propre rôle, et un regard distancié sur l'industrie du spectacle. Autant d'éléments que Larry Charles conservera dans son deuxième projet phare pour HBO, dans une optique délibérément axée grand public : Entourage s'inspire des premières années hollywoodiennes de Mark Wahlberg, de ses frasques avec ses inséparables potes relous. Artistiquement, ce déballage de private jokes sur le milieu huppé des jeunes acteurs laisse de marbre. Mais Larry Charles aura atteint son but : marquer la singularité de HBO sur un créneau comique peu exploré, questionner l'humour télévisuel en le faisant évoluer vers des formes pertinentes sur le papier (mais un peu moins à l'écran), dont le réel aboutissement n'est autre que le film Borat.FC


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L'autre "cinéma du réel"