Libero

de et avec Kim Rossi Stuart (Italie, 1h48) avec Allessandro Morace, Marta Nobili...


Pour ceux que le football ne passionne pas, expliquons que sur un terrain, le libero est le dernier défenseur avant le gardien de but. Le titre de ce beau premier film de Kim Rossi-Stuart, acteur chez Amelio, Benigni ou Placido, vient de là, même s'il n'y est guère question de ballon rond. Rossi-Stuart dépeint une famille où les deux enfants (un garçon, une fille) sont sous la garde du père (incarné par Rossi-Stuart lui-même), un caméraman dans la dèche. Le point de vue adopté est celui du garçon, qui entretient une complicité admirative envers son paternel. L'équilibre fragile de cette cellule familiale qui se tient juste au-dessus du seuil de pauvreté est brutalement remis en cause quand la mère revient, bien décidée à retrouver sa place et son rôle quitte à en rajouter dans la compassion et l'autodafé. Le talent de Rossi-Stuart, c'est de laisser en permanence une marge d'incertitude concernant ses personnages : le vernis d'attention du père craque régulièrement sous le coup d'incompréhensibles accès de colère et de violence (notamment dans l'incroyable scène de la pub avec les chameaux). On n'est pas loin alors des meilleurs Ken Loach (ses films contemporains en tout cas), particulièrement dans la volonté d'installer dans la durée les situations paroxystiques... Cette obstination à tenir cette ligne difficile dans sa mise en scène s'avère en bout de course émotionnellement payante, le spectateur épousant progressivement les sentiments déboussolés de l'enfant, et comprenant par empathie sa solitude grandissante. En cela, Kim Rossi-Stuart fait preuve d'une maturité impressionnante pour un premier film, tout en gardant une très saine modestie (l'histoire et les personnages sont son souci premier). Nos acteurs français qui se prennent pour des cinéastes devraient méditer la chose...Christophe Chabert


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