«La Demeure du Chaos, c'est une utopie»

ENTRETIEN / THIERRY EHRMANN, PRINCIPAL FONDATEUR DE LA DEMEURE DU CHAOS, PATRON DU GROUPE SERVEUR PROPOS RECUEILLIS PAR DALYA DAOUD


On a l'impression d'une urgence en visitant la Demeure. Vous êtes un fou d'informations, alors comment fait-on le tri ?Thierry Ehrmann : L'art est toujours urgent. Ici on a en permanence dans la tête quatre ou cinq événements de dimension mondiale que l'on aimerait traiter. Chaque matin, je dissèque la presse internationale dans un petit café de Couzon, c'est incontournable. Je repère très vite un événement où il y a une densité, qui va provoquer l'instinct. Après, on s'engueule entre plasticiens pour savoir comment on va traiter tout ça. D'ailleurs j'aimerais que les artistes sachent qu'ils peuvent venir bosser ici. À la condition qu'ils aient une réflexion en amont, et une vision de l'histoire de l'art. En plus c'est payé...Vous connaissez bien le marché de l'art, c'est votre métier : est-ce que la Demeure a une valeur commerciale?D'un point de vue pragmatique, non. Impossible de vendre ça par morceaux. Le postulat de départ était de créer une œuvre in situ. D'après le contrat de départ de 1999, elle n'est pas cessible. Je souhaite qu'elle soit classée, et elle finira sans doute par l'être, pour que tout continue après moi. C'est une œuvre collective et avec les artistes de trente nationalités différentes qui y ont déjà participé, la céder poserait des problèmes énormes. En réalité, la Demeure est indémontable, c'est une bombe juridique qui fait intervenir les droits de chaque artiste enchevêtrés dans les droits internationaux.Alors l'affaire de la Demeure qui part en cassation, ça vous fait plutôt rire?C'est aussi tenter de faire sauter une partie du système français très con, concernant le statut de l'œuvre d'art et de l'artiste. L'art doit toujours être contestataire et en rupture. La Demeure du chaos est une utopie. Et puis mort aux cons.Vous aimez bien les formules...Oui, elles font référence à des événements et à une conscience politique. Parce que, sans rire, l'utopie, c'est vachement important, non ?


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Péril en la demeure ?