Musique en campagne

Pop-Rock / La campagne officielle pour la présidentielle ne débutant qu'au printemps prochain, l'automne tout entier pourra être consacré à de folles soirées de concerts. Ça tombe bien, l'offre est pléthorique. Emmanuel Alarco


Commençons par nous débarrasser des mauvaises nouvelles : le concert de TV on the Radio prévu pour novembre est annulé. Voilà, c'est fait. Malgré cette décapitation violente, la rentrée musicale a tout de même de la gueule. La tendance lourde pour cet automne 2006 : la France. Mais attention, une France première classe, bien au-dessus de l'image désespérante que voudraient nous faire avaler certains de nos politiques. Ici, quand on voudra parler de retour à la terre et aux saveurs authentiques de nos campagnes, on ira écouter l'immense Dick Annegarn (le 6 octobre au Théâtre de Vienne), l'agaçant (parfois exaspérant) mais indispensable Jean-Louis Murat (le 15 novembre au Kao) ou son disciple drômois Cyrz (le 20 octobre à la salle Victor Hugo, avec quatuor à cordes), plutôt que de se farcir les kermesses rances de Philippe de Villiers, père fouettard d'une France sépia habilement raillée dans le dernier (très bon) Vincent Delerm (le 7 mars à la Bourse du travail). Quand on voudra déclarer sa flamme à l'Amérique, on n'ira pas faire des mamours à l'un des chefs d'état les plus crétins de l'Histoire comme tonton Nicolas, non, on préférera reprendre en chœur les refrains parfaits d'Herman Düne (le 3 novembre à Grnd Zero) ou s'intéresser aux nouvelles aventures d'un ex-Madrid devenu cow-boy au sein de Thousand & Bramier (le 30 octobre avec Selar). Eh oui, contrairement à pas mal de nos chers dirigeants, les frenchies maîtrisent la langue de Lou Reed, et de Jack the Ripper (le 3 novembre au Kao) à Phoenix (le 12 octobre aussi au Kao) en passant par l'éternel mystère Oslo Telescopic (un véritable événement le 2 novembre à l'Épicerie Moderne avec les légendaires The Ex) ou Cyann & Ben (le 9 novembre au Sirius), ils seront nombreux à nous prouver que pour l'enseignement de l'anglais, le salut passe par le rock'n'roll.PrésidentiablesCôté éléphants, la France qui chante peut là encore donner quelques leçons à celle qui dirige. En effet, chez les ténors que sont Katerine (le 18 octobre au Transbo) et Dominique A (le 11 novembre à la salle Molière), pas de casserole à traîner, aucun scandale à faire oublier et encore moins de retour foireux à justifier. Juste des sillons singuliers et ambitieux tracés patiemment depuis 15 ans, pour le bien de tous. Quant aux (plus si) jeunes excités qui font preuve d'une belle énergie mais racontent parfois n'importe quoi, avouons que les gens de Dionysos (le 23 novembre au Radiant) ont tout de même l'air un peu plus sympathique qu'Arnaud Montebourg. Enfin, pour que ce tableau hexagonal soit plus complet, saluons la venue de Mônsieur Didier Super (le 18 novembre au Kao) ainsi que celles des plus ou moins brillants Holden (le 1er décembre à l'Épicerie Moderne), Eiffel (le 22 novembre au Marché Gare), Emily Loizeau et Barbara Carlotti (le 19 octobre à la Plateforme).Affaires étrangèresSi la France débarque en force, elle n'est heureusement pas la seule raison de se réjouir en ce début de saison. Quelques étrangers (de passage, rassurez-vous Monsieur Sarkozy) nous ferons profiter de leurs "compétences" et de leurs "talents". Si certains, comme le Suisse Polar (le 18 octobre au Sirius) ou le Belge Saule (le 14 octobre au Kao) tenteront de gruger en chantant en français, d'autres joueront cartes sur table et opposeront un joli contre-pouvoir à la francophonie. Ce sera le cas de Venus (le 21 novembre au Kao), Shearwater (le 5 novembre au Sirius), Mojave 3 et Castanets (le 16 ou 17 novembre), Jude (le 16 au Kao) ou encore, dans des registres fort variés et avec des fortunes diverses, The Bellrays (le 12 novembre au Kao), The Roots (le 4 décembre au Transbo), Archive (le 11 octobre au Transbo), Ben Harper et surtout sa première partie Piers Faccini (le 18 octobre à la Halle).Fini de squatterRégularisés péniblement mais massivement, les ex-squatters de Grnd Zero peuvent désormais s'en donner à cœur joie et ne semble pas avoir l'intention de s'en priver. Outre les fantastiques dünes suscités qui reviendront en habitués, les superchampions nous ont concocté un programme costaud. Entre mille choses tout à fait inconnues et probablement passionnantes - quelques piliers anti-folk ou autres échappés du label Constellation -, on retiendra trois "grosses" affiches : Casiotone for the painfully alone, rejeton caché de Daniel Johnston (le 12 octobre), Grizzly Bear, la nouvelle sensation pop de chez Warp (le 1er novembre) et Ramona Cordóva (le 14 décembre). Après un concert absolument renversant au mois de juin (au Sonic), on aimerait sincèrement que le public soit au rendez-vous de cette deuxième visite et découvre enfin les chansons célestes du petit Ramón. Nul doute que la présence sur la même affiche du magicien électro-acoustique Kieran Hebden alias Four Tet facilitera les choses. Et puisqu'une bonne campagne se termine toujours par quelques effets d'annonce tonitruants : Grnd Zero nous promet The Go Team et Jeffrey Lewis, tandis que Birdy Birdy Partners "espère" Sparklehorse, Guillemots et Yo La Tengo... Gageons qu'une fois de plus, la musique montrera l'exemple.


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Dans de beaux draps