La Biennale accélère la cadence


Danse / Après des débuts balbutiants, la Biennale de la Danse a haussé le ton cette semaine en présentant deux œuvres fortes signées respectivement Tino Fernandez (Cie colombienne L'Explose) et Frédéric Flamand (avec le Ballet National de Marseille qu'il dirige). Dans Frenesi, Tino Fernandez nous plonge dans l'atmosphère aseptisée d'une morgue. Cinq garçons nus (dont un nain) y dansent avec quatre filles, à corps perdus, dans la violence, la contradiction et la frénésie de leurs pulsions. Si la technique n'est pas toujours là, l'intensité et l'engagement des danseurs y pallie. La pièce alterne entre des moments de danse aux résonances rituelles (danses tribales, flamenco, tauromachie...) et moments gelés (poses figées ou danses contorsionnées et lentes...). Structure binaire et simpliste ? Tout au contraire : Frenesi confronte intelligemment l'ancien et le moderne, le cuit et le cru, l'érotisme et la mort, geste hiératique et geste clinique... Pour Frédéric Flamand, en revanche, tout n'est définitivement qu'ultra modernité et démesure urbaine dans Metapolis. La pièce fait se succéder des tableaux baignés de l'atmosphère métallique et technologique de nos mégalopoles. Tout n'est ici qu'acier tranchant, propulsion, vitesse : musique, costumes, gestuelle et images vidéo. Celles-ci sont d'ailleurs utilisées avec finesse (fait rarissime), n'écrasant jamais la danse techniquement très impressionnante du ballet marseillais... On finira quand même sur une énorme déception : Jan Lauwers et sa très surestimée Chambre d'Isabella. Si les comédiens-danseurs se montrent parfois capables d'électriser la scène avec des danses proches du délire collectif, et d'émouvoir aux larmes par leurs chants choraux, le mode de narration assommant et le jeu théâtral catastrophique de certains interprètes (éructant) laissent pantois. Une demi-heure de foudre pour une 1h30 d'ennui : avec un tel ratio, il n'y a pas de quoi crier au chef-d'œuvre ! Jean-Emmanuel Denave


<< article précédent
Corps sous toiles ou poils