Miss électronique


Émilie Simon a le teint pâle et laiteux. Sa musique reflète cette image trouble : opaque, mystérieuse, sombre, un brin artificielle, un peu trop fabriquée. Mais là où la fabrication fait figure d'artisanat brillant, c'est lorsqu'elle s'attelle au bidouillage électronique. Pratique virtuose et inventive, elle malaxe résonances techno, rythmes non occidentaux, superpose des voix suraiguës (anges plaintifs), des cloches cauchemardesques, voire inquiétantes (très hitchcockiennes), des sons graves. Sur cette base de trip-hop douceâtre, instruments classiques ou folkloriques s'emmêlent en courbes envoûtantes. Déjà, tout l'attrait de son premier album résidait dans cette capacité à créer des atmosphères narratives, comme dans un I wanna be your dog intrigant qui s'imprime dans nos cervelets. Végétal, dernier album de la demoiselle aux multiples talents (écriture, compositions, arrangements), monte d'un palier dans la beauté des compos et la voix se détache du rôle de femme-enfant. Moins truquée, plus expressive, même si certaines inflexions tendent nettement vers les sinuosités hautes et sophistiquées d'une Kate Bush et qu'on la préfère dans ses interprétations plus ambiguës d'une Bjork, la voix plus naturelle se déploie en particulier sur les titres anglais. Superbes Sweet blossom et My old friend. La branche verte s'encanaille plus loin dans le langoureux Opium, invitation détournée à la sensualité. Alicia, Annie ou En cendres, trafiquent les mots, les assemblent et sonnent comme des poèmes musicaux. Ses petites pièces épousent le canevas des partitions contemporaines, mais détourné par son imaginaire lyrique... Quel meilleur lieu que Musilac aurait pu accueillir cette sylphide rock ? Musilac, les 7, 8, 9 juillet à Aix-les-bains (Savoie)Émilie Simon le 9 juillet


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Le portrait sous trois facettes