Merzi, c'est trop

Folk /Mélodies suprêmes, spleen fugace et ballades de première classe, Merz le conteur d'étoiles fait escale à Grenoble le 21 juillet. Une date unique sur son agenda nomade, qui pourrait bien prétendre au titre de concert de l'année. Stéphanie Lopez


Il y a quelques semaines, notre cœur s'était emballé sur Loveheart - second album de Merz qui nous avait filé des frissons plein la page sélection. Depuis, la flamme n'a pas faibli, au contraire, elle s'est même muée en éruption lyrique lorsque le Cabaret Frappé a annoncé un changement dans sa programmation. Le 21 juillet, ce n'est plus Sébastien Schuller qui partagera l'affiche avec la pop hawaïenne de Troy Von Balthazar, mais un autre esthète aux cordes ultrasensibles. Un type rare (2 albums en 7 ans) et mystérieux : on sait peu de choses en effet sur Conrad Lambert - si ce n'est, on vous rassure, qu'il n'a aucun lien (artistique ou sanguin) avec le vilain Christophe. Pas ou peu d'interviews, des lives au compte-goutte ; cette âme intègre et solitaire semble fuir les règles du music business comme un ermite fuit les foules fanatiques. Aux lueurs éphémères du star system, Conrad Lambert préfère la lumière plus durable de son étoile intérieure. Plutôt que de signer cash pour un live tour effréné sur les routes de la gloire, ce sage disciple bahaï ne transige pas : pour lui, ce sera la voie bohème de l'aventure spirituelle. Car Merz est un voyageur, un trouvère ésotérique et sans frontière, qui quitte volontiers son Yorkshire natal pour irriguer sa musique de folk traditionnel et de sagesse orientale. À l'image des éléphants qui portent la terre entière sur le dos du CD, Loveheart déambule avec panache et nonchalance, entre thèmes sacrés et pop profane. Si l'Amour reste la quête suprême de ce crooner baroudeur, l'influence de la mystique perse l'éloigne vite des Dangerous Heady Love Schemes classiques. Corps et âmeComme toute bonne pop qui se respecte, Loveheart parle d'amour, bien sûr, mais s'adresse directement au cœur : loin des schémas passionnels et des fixettes sur la personne, Merz transcende l'ego (souvent démesuré) de l'artiste pour mieux toucher la grâce, libre et saisissante, d'un Butterfly affranchi des lois de la réussite commerciale. Conséquence : une musique éminemment sincère, qui confine à l'harmonie universelle. De fait, on peut d'abord penser à plein de monde en écoutant Merz, pleins de groupes ou de références (de Nick Drake à Radiohead, en passant par Dylan et Syd Matters...). Mais plus sa musique coule et plus la beauté devient limpide. Au finale, on ne pense plus à rien, absorbé corps et âme par l'évidence mélodique de cet artiste multicartes (chanteur, compositeur, arrangeur et producteur) qui sait tout faire et bien. Alors on le répète, pour ceux qui n'auraient pas tout suivi : Conrad Lambert est un type rare et précieux. C'est dire s'il serait dommage de louper l'unique concert qu'il donnera dans la région cet été.MERZ + TROY VON BLATHAZARLe 21 juillet au Cabaret Frappé (Grenoble)


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