Tout pour la musique

Entretien / Comme chaque année, Jean-Pierre Bouchard, chargé de la Mission musique pour la Ville de Lyon, nous parle de la Fête du même non. Même pas en exclusivité ni rien mais on ne change pas une équipe qui gagne. Propos recueillis par Dorotée Aznar


25 ans de Fête de la Musique, 5e édition à Lyon... Quel bilan tirez-vous de votre travail ?Jean-Pierre Bouchard : Quand j'ai commencé à travailler sur la Fête de la musique, on m'a accusé de vouloir tuer la dynamique locale en prétendant que cette fête n'avait pas besoin d'être organisée. La première année, 10 équipes ont répondu à l'appel à projet lancé par la Ville, plus de soixante cette année. Je crois que j'ai réussi à prouver que l'organisation avait du bon !Quels sont les critères de sélection pour être intégré au programme officiel ?Il y a plusieurs critères pour sélectionner les groupes. On souhaite préserver un équilibre entre amateurs et groupes déjà constitués, assurer une bonne rotation des équipes (on accepte par exemple des projets parce qu'ils sont d'accord pour aller dans certains territoires). Nous veillons également à l'engagement des acteurs dans leur projet (leur motivation) et à la représentation de tous les styles de musique.Toujours aucun critère artistique ?Les groupes qui jouent pendant la Fête de la musique ont besoin de se faire connaître. On trouve quelques groupes qui tournent déjà mais 48% des projets retenus sont réellement amateurs. On note un retour du hip-hop et une large poussée de l'électro cette année...Oui, la Fête de la musique doit être ouverte à toutes les musiques. J'ai pensé que la présence du hip-hop allait de soi et comme nous avons beaucoup travaillé avec le collectif l'Original cette année, leur présence pendant la fête était évidente. Pour l'électro, il y a vraiment une dynamique, 15 projets ont été présentés et une dizaine a été sélectionnée. Le soir du 21, on trouvera six scènes électro et une scène metal. Le programme est ouvert aux musiques actuelles mais également à la musique classique, aux musiques du monde, à la musique militaire... il y a même des chansons pour enfants. La programmation est la plus éclectique possible.Avez-vous des retours sur la fréquentation ?Il y a beaucoup de monde en centre-ville bien sûr, mais pas uniquement. Selon les services de sécurité, la fréquentation de la Fête de la musique avoisine celle d'une manifestation comme le 8 décembre.Combien ça coûte ?Le budget est cette année de 46 000 E (6000 E de plus que l'an dernier, ndlr). Il est complété par l'intervention des services logistiques de la ville, que l'on peut évaluer à 30 000 E environ ainsi que les frais de communication engagés par la ville et qui ne sont pas chiffrables. Il faut également ajouter les salaires de trois personnes chargées de l'organisation de cette fête. Nous avons de la chance, Lyon est encore une ville où l'esprit financier n'a pas supplanté l'esprit de la fête. La Fête de la musique doit rester la fête de l'envie, de l'opportunité et du désir. Le rôle de la collectivité est de faire le lien entre des gens qui ont envie de jouer et des salles qui sont prêtes à jouer le jeu. À quoi est due, selon vous, l'inflation de la demande ?La demande croissante est la traduction d'une frustration, d'une demande inassouvie et même si tous les désirs ne sont pas légitimes, je pense que mon travail ne s'arrête pas le 21 juin. L'enjeu, c'est la pratique des gens et je pense qu'il y a un vrai besoin à Lyon. Il faut répondre à ces besoins avec des outils adaptés. C'est pourquoi j'ai décidé de développer des projets annexes, comme l'édition d'un DVD Fête de la musique qui sera projeté pendant la Fête de la musique de Paris ou l'ouverture d'une base de données pour faciliter la mise en relation des artistes qui cherchent un lieu avec ceux qui sont susceptibles de les accueillir...Que souhaitez-vous améliorer pour les prochaines éditions ?Il faut qu'un vrai travail sur l'espace public soit mis en place. Il n'est pas possible d'en rester là. Je vais tenter de développer une Fête de la musique au niveau du Grand Lyon car il y a encore beaucoup de lieux où il ne se passe rien. J'ai tenté de le faire de manière formelle cette année, mais je n'ai pas réussi. Je le tenterai donc de façon informelle pour la prochaine édition. Je pense en effet que, pour les groupes, il vaut mieux pouvoir jouer sur la grande place d'une petite commune plutôt que de jouer dans sa cave !


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