Pluto trash

Expos / Deux expositions bien acides pour se rafraîchir les idées : Naoko Okamoto se fait la peau de Walt Disney à Métropolis tandis que Jean-Xavier Renaud dessine sa libido et sa haine de la beauferie chez Françoise Besson. Jean-Emmanuel Denave


Les Japonais n'ont pas d'inconscient disait Lacan... Eh bien, nom d'un Pluto, Naoko Okamoto nous prouve le contraire. Tant l'inconscient de cette jeune artiste née au Japon et vivant à Paris s'avère bel et bien consistant, voire chargé : de cuir, de menottes, de poupées gonflables, et de toutes sortes de fantasmagories grinçantes. Il serait même quasiment schizoïde, mêlant l'univers de l'enfance et de Walt Disney à celui du sexe et du sado-masochisme le plus cru. Son Pluto en peluche apparaît ainsi langue pendante et percée, collier clouté au cou et menottes SM aux pattes. Il monte la garde devant sa niche qui n'est autre qu'un sex-shop ! Non loin de là : deux peintures en diptyque où deux des couples idéaux de notre enfance sont reconfigurés et re-sexualisés : Blanche Neige tripote Cendrillon, tandis que sur l'autre tableau les deux princes vont bientôt se rouler une pelle royale... "C'est une sorte de vengeance. J'attaque cet univers qui nous a attaqué lorsque nous étions enfants", confie dans un sourire Naoko Okamoto (à qui, soit dit en passant, l'on donnerait le bon dieu sans confession). Comprenez : on s'est bien moqué de nous, on nous a bien martelé l'esprit et formaté le désir, ça vaut bien une petite revanche artistique et libératrice. Alors allons-y gaiement : une chaise de bébé transformée en chaise électrique, un bureau d'enfant surmonté d'une guillotine, un Dumbo crashé et transformé en fontaine de sang, des ardoises de restaurant surmontées de portraits de personnages idoines (Bambi pour "La spécialité de la maison : carpaccio de cerf à l'huile de truffes à 19€" ; Donald pour "La spécialité du chef : terrine de foie gras de canard à 14,95€")... Savoureux non ?Dis, dessine-moi un mouflonDans un registre proche mais plus trash encore, Jean-Xavier Renaud (né en 1977) tient la chronique de ses fantasmes et des poncifs de notre époque avec ses dessins de petit ou grand format, à l'aquarelle surtout, mais aussi au bic, à la craie grasse, à l'encre de Chine... Dessins violents, urgents, débridés, pour le meilleur (souvent) et pour le pire (parfois, avec des blagues pipi-caca lourdingues). Ça copule beaucoup sur le papier, ça sécrète un tas d'humeurs, ça ironise plein pot sur l'univers des beaufs, les bonnes intentions, les bons sentiments (l'Amour est ici résumé à une scène d'alpage romantique : un moustique géant humant affectueusement l'anus d'un mouflon). Enfant de Robert Combas, Jean-Xavier Renaud a un trait sûr et b(r)ouillonne d'énergie, se risquant jusqu'à une œuvre monumentale : deux odalisques trinquant sous le sperme arc-en-ciel d'un type accroché au plafond de leur chambre...Naoko Okamoto à la Galerie Métropolis, jusqu'au 1er juilletJean-Xavier Renaud à la Galerie Françoise Besson, jusqu'au 14 juillet


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