Singes (petits) malins

Rock / Pas aussi géniaux que le laissait présager leur réputation outre-Manche. Pas aussi mauvais que le voudrait la résistance. Arctic Monkeys est juste un petit groupe attachant pour tous ceux qui ont eu un jour 19 ans. Emmanuel Alarco


Au commencement était le buzz. À l'automne dernier, la presse rock hexagonale nous vendait les Arctic Monkeys comme The next big thing et l'on se souvient encore de l'excellent Pierre Siankowski des Inrocks, pour ne pas le citer, qui narrait dans la plus belle tradition Gonzo, son périple à Londres pour un concert survolté des quatre petits gars de Sheffield. Alléchés, mais méfiants - combien de baudruches dégonflées après un échauffement trop poussé pour un seul vrai beau ballon de coupe du monde -, nous jetions une première oreille à la musique des Monkeys, présentée comme la quintessence de l'anglitude, alliant la verve de Mike Skinner (The Streets) et Joe Strummer (The Clash), pour le côté réalisme social, et le groove blanc des Jam. Premières mesures, sentence immédiate : "Putain, c'est ça Arctic Monkeys !" Un rock basique de teenagers répétant dans le garage de leur mémé, sans grande inventivité mélodique, ni énergie particulière. Un son plat comme on n'oserait pas en produire chez nous, des singles-qui-tuent rentrant par une oreille et sortant par l'autre... du flan. Leurs textes pouvaient bien émouvoir les kids britons...Teenage kicksÀ l'approche du concert lyonnais, on s'est dit qu'on allait tout de même se pencher plus précisément sur le cas de cette nouvelle sensation rock assistée par ordinateur (la réputation du groupe s'est faite sur myspace.com, sorte de meetic sonore qui depuis quelques mois agite pas mal le landernau musical international). Et là, pas de grande révélation, non, mais un insidieux parfum de revenez-y et quelques phénomènes physiques inexpliqués : le mythique single Fake tales of San Francisco, si pâlot à la première écoute, qui s'invite plus que de raison dans la valse des gimmicks qui tournent en boucle dans nos crânes, la longue intro du strokesien A certain romance qui donne envie de sauter partout... Et ces fameux textes. La rumeur disait vrai. Dans une langue à la fois très directe et sophistiquée, Alex Turner (19 ans !) se révèle vaillant chroniqueur de la vie trépidante des jeunes adultes - ou vieux ados - du nord de l'Angleterre. Les filles, les boîtes, ne pas oser parler aux filles en boîte, ne pas pouvoir rentrer en boîte sans fille... Un petit monde savoureux dans lequel son évident sens de la formule nous fait entrer en deux temps, trois bières : "There ain't no love, no Montague's or Capulet's/Just banging tunes in dj sets". Dancefloor salaces et flirts bon marché, on a fini par éprouver une certaine tendresse pour ces petits singes malins. Peut-être parce qu'au fond, on aura toujours un peu 19 ans.Arctic Monkeys + MilburnAu TransbordeurDimanche 30 avril à 18h30


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Cio pantin