L'Armée des ombres


Musique / Nick Talbot est un authentique inadapté. Vivant à Bristol, où les ébats entre dub soul et hip-hop donnèrent naissance au trip-hop dans les années 90, le gars n'a rien trouvé de mieux que de jouer du folk. Définitivement à côté de la plaque, il aura même l'audace de signer chez la plus électronique des maisons anglaises, Warp, label historique d'Aphex Twin, Autechre, Boards of Canada et bien d'autres hommes-machines de génie. Pour dire à quel point l'homme aime les contre-pieds, alors que le monde célèbre aujourd'hui le dieu folk sous toutes ses formes, il décide pour son 4e album de délaisser (partiellement) sa bonne vieille guitare sèche pour prendre un virage, qu'on pourrait qualifier de post-rock... genre un peu en crise depuis quelques années ! Derrière les complaintes blafardes de Gravenhurst, c'est désormais les ombres de Slint, Tortoise ou Mogwai qui rôdent ; inquiétants fantômes maniant à merveille l'art du calme avant la tempête (et vice-versa) et trouvant un écho glaçant les textes poisseux de Talbot. Jeunes Anglais en goguette présentés comme des animaux dégénérés sortant des égouts ; désir de tuer enfoui dans le cœur de chacun ; morts désespérant de leur impuissance face aux vivants reproduisant les mêmes erreurs qu'eux ; rêves de suicide... Pour se rendre au studio d'enregistrement où est né Fires in distant buildings, Nick Talbot confie qu'il passait tous les jours par le cimetière voisin, histoire de s'imprégner d'une certaine " terreur esthétique " proche du climat qu'il recherchait pour son disque. Inutile de dire qu'il a réussi son coup. EAGravenhurstVendredi 3 mars à 20h30À la Marquise


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La Fièvre dans le son