Quand Lasalle s'ennuie


Théâtre / Faulkner écrit Requiem pour une nonne en 1951. Cette ébauche de pièce sera adaptée par Camus quelques années plus tard. On y retrouve l'héroïne de Sanctuaire, Temple Drake, sept années après son enlèvement et sa séquestration dans une maison close. Elle est devenue l'épouse respectée du très respectable Dowan Stevens, responsable de son infamie. Mais le sort semble s'acharner sur la jeune femme. Le rideau s'ouvre sur la condamnation à mort de Nancy Mannigoe, ancienne prostituée et nurse du couple, pour le meurtre de leur petite fille. Avant l'exécution de la sentence, Gavin, oncle de Temple et avocat de Nancy, va tenter de faire éclater la vérité et de révéler les secrets au grand jour. Si Requiem pour une nonne présente un intérêt littéraire certain, le texte se révèle, dans la mise en scène de Jacques Lasalle d'un intérêt dramaturgique fort discutables. Il ne se passe rien et ce n'est pas le jeu des comédiens qui vient compenser l'absence totale de rythme et d'action. Lassalle devient un Colombo moralisateur qui aurait troqué l'imper pour une veste en cuir et la sublime Marie-Josée Croze ne doit surtout plus hésiter entre l'écran et les planches. Dans le rôle de Temple, la belle est un personnage vide, aux geignements à la limite du supportable et l'on donnerait cher pour obtenir une once de naturel voire, à la limite, quelques instants de silence. Pour achever le polar, il ne manquait qu'une mise en lumière digne d'un des meilleurs épisodes de Derrick : le rouge pour la passion, le blanc pour la pureté et un jaune sépia pour la séquence souvenir, agrémentée d'une photo de bordel pour ceux qui auraient oublié l'intrigue en cours de route. À l'usage, l'ennui des comédiens se révèle communicatif. La salle sombre dans une torpeur polie, que les quelques réussites de la deuxième partie de la pièce peinent à dissiper.Dorotée AznarRequiem pour une nonne, Jusqu'au 21 janvier, Au Théâtre National Populaire


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