"Il y a un public pour l'art contemporain"

Interview / Thierry Prat, régisseur artistique général du Musée d'Art Contemporain et de la Biennale d'Art Contemporain de Lyon. Propos recueillis par JED


145 000 visiteurs à l'expo Warhol : comment interprétez-vous ce succès phénoménal ?Thierry Prat : La seule explication valable est que Warhol est un véritable mythe contemporain. Les gens en ont tous entendu parlé, mais personne en France ne connaît "concrètement" Warhol : il y a une pièce au Musée de St-Etienne, une à Grenoble, deux ou trois à Beaubourg... Alors qu'en Allemagne, dans chaque musée d'art contemporain, il y a quatre, cinq ou six Warhol. Les Français étaient donc ravis de voir pour une fois une exposition avec un certain nombre de pièces de Warhol (la dernière grosse expo Warhol ayant eu lieu en France il y a 17-18 ans, hormis Monaco).Allez-vous renouveler ce type d'exposition ?Oui, ce succès nous y incite, mais il faut rappeler que l'expo Warhol a été très coûteuse, et n'a pu être montée qu'en collaboration avec d'autres musées. Le musée ne peut pas monter une expo patrimoniale de même nature seul, sur son propre budget (autour de 700 000€ en moyenne). Cette expo Warhol est l'expo qui a reçu le plus de visiteurs en Province (y compris avec les expos des Musées des Beaux-Arts) : ça prouve qu'il y a un public pour l'art contemporain. Mais ne rêvons pas trop, il existe peu de figures aussi importantes que Warhol dans l'histoire de l'art.L'année 2005 a été une année pleine pour l'art contemporain à Lyon...Oui, en plus de Warhol, le musée a fait quelques 92 000 entrées avec ses expos "extérieures" en Chine et à l'Orangerie du Parc, et la Biennale compte déjà 142 000 visiteurs à ce jour (soit une augmentation de plus de 35% par rapport à 2003) ! En Rhône-Alpes, les gens sont très cultivés : c'est la région où se vend le plus de livres par habitant. Dans les années 1980, il n'y avait pas beaucoup d'art contemporain à Lyon - ni en France en général, il manquait une culture visuelle contemporaine. En quelques années, on a réussi avec l'activité du musée, des biennales et des nombreux centres d'art, à montrer à peu près tout ce qui s'était fait en art depuis le début du XXe Siècle. Les Lyonnais ont ainsi pu créer leur propre regard. Qu'aujourd'hui il y ait un retour sur cet investissement, ça me paraît tout à fait logique.


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