Un Richard III en sang et or


Théâtre / Alors qu'Emmanuel Meirieu triomphe avec un Night Heron typique de sa nouvelle manière, il est amusant de voir au même moment le Richard III monté par Philippe Calvario, qui ressemble à ce que le théâtre de Meirieu aurait pu devenir s'il avait poursuivi dans sa veine "de jeunesse". Les points communs sont nombreux : utilisation de la musique (la reprise de Sweet Dreams par Marylin Manson comme dans La Petite fille au chalumeau), sonorisation de certains personnages, costumes soigneusement barrés, personnages décalés (deux tueurs tarantinesques hilarants), hémoglobine, viande fraîche et références très visibles (ici, c'est l'ombre de Kurosawa qui plane au-dessus de cette adaptation). On notera d'ailleurs que les metteurs en scène sont plus prompts à repérer et récupérer les formes théâtrales novatrices que les critiques dramatiques locaux... Qu'importe à vrai dire, c'est le résultat qui compte, et contre toute attente Richard III est un bon spectacle. Calvario, intelligemment roublard, a bossé de près son Shakespeare et fait la part du bon grain réaliste et de l'ivraie fantaisiste, créant un univers abstrait mais crédible et parfois vraiment surprenant. C'est le petit coup d'audace d'un spectacle qui fait quand même gaffe à ne pas sortir du théâtralement correct : diction appliquée, texte intégral et grande star sur le plateau. Philippe Torreton ne rate pas son rendez-vous avec LE personnage du répertoire shakespearien : on aurait pu rêver un Richard plus séduisant, moins immédiatement grotesque et pitoyable ; mais sur ce registre-là, il faut reconnaître que Torreton excelle, sans pour autant écraser la troupe d'excellents comédiens qui l'entoure. Une conclusion plutôt capilotractée et un petit coup de mou au retour d'entracte n'enlèvent rien à la valeur du spectacle, bon exemple de théâtre populaire et néanmoins culotté.CCRichard IIIAux Célestins Théâtre de LyonJusqu'au 10 décembre


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