Party, à bloc !

Musique / Avant concert au Transbordeur, démontage du phénomène Bloc Party, qui aurait pu n'être que le énième rejeton de la nouvelle vague rock anglaise. Alors que pas du tout... Christophe Chabert


Préjugé 1. Quand un groupe fait un single qui tue, on attend l'album avec impatience. Quand un groupe fait trois singles qui tuent à la suite, on se dit que c'est un groupe à singles, et que l'album ne pourra jamais être à la hauteur. Préjugé 2. Quand un groupe fait du rock énergique, avec batterie qui envoie du bois, guitares lâchées et tourbillonnantes et chanteur à la limite de casser une corde vocale, on imagine qu'il s'appelle The quelque chose. Préjugé 3. Quand un groupe arrive à faire bouger sur le dancefloor tout ce que la France compte de popeux blancs hétéro moulés dans des jeans trop courts et des T-shirts trop étroits, on imagine que leurs membres ressemblent à la communauté de fans qu'ils ont instantanément fédérée. Préjugé 4. Quand un groupe saisit à ce point l'air du temps et se place avec autant de malice dans la mode du moment sans pour autant passer pour le énième rock-band exploitant la tendance nostalgico-casse-burne, on se dit qu'il passera peut-être l'hiver, mais qu'aux premières jambes dévoilées, il ira rejoindre les bacs des soldeurs à prix cassé.La théorie du bloc1. Un des singles s'appelle Banquet. Il figure en bonne place sur Silent alarm. C'est une bombe, une tuerie, ou une autre expression de jeunes qui dit finalement très bien ce qu'elle veut dire. Mais juste avant ce tube fracassant, il y a un morceau qui s'appelle Positive tension. C'est, discrètement, un des moments les plus emballants de l'album, celui où le groupe dose ses montées d'adrénaline, dépouille le morceau pour mieux l'électriser ensuite, où le chanteur retient sa voix avant de l'envoyer en l'air, littéralement. Avant ce joyau, il y a un autre tube, Helicopter, une bombe, une tuerie, tout ça. Et avant, il y a un autre diamant noir, Like eating glass... Dans l'autre sens, ça marche aussi : une bombe, un morceau formidable, une bombe, un morceau formidable... Silent alarm est un grand album. 2. Au fait, le groupe s'appelle Bloc Party. Pas The Bloc Party, juste Bloc Party. 3. Surprise, son chanteur, son âme, celui qui a si bien digéré 30 ans de musique populaire anglo-britannique, est noir. Et, deuxième surprise, il a récemment fait son coming out. 4. Bloc Party, c'est la noce magnifique entre une imparable efficacité mélodique, un sens magistral de l'énergie rock et une intelligence complexante pour ménager des espaces où leur musique se révèle dans toute sa subtilité. Quelques mois après la sortie de l'album, on est encore à le creuser dans tous les sens, on trépigne à l'idée de les voir sur scène. Et les jambes des filles se dévoilent à nouveau dans les rues.Bloc PartyAu Transbordeur le samedi 14 mai"Silent Alarm" (Wichita/V2)


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