Tout ça pour ça

Feuilleton / En mettant un terme prématuré au suspens autour de la reprise du Transbordeur, et en reconduisant Victor Bosch dans ses fonctions de directeur, Patrice Béghain et la Ville de Lyon font le choix d'une continuité qui semblait pourtant ne satisfaire personne. Dorotée Aznar


Après un an et demi de procédure, il ne restait plus que trois candidats : Jean-Pierre Pommier, d'Eldorado and Co (l'un des principaux organisateurs de concerts sur Lyon et sa région), Thierry Pilat, administrateur du Ninkasi Kao et Victor Bosch, à la tête du Transbordeur depuis quinze ans. La Ville de Lyon a annoncé sa décision : Victor Bosch est reconduit à la direction du Transbordeur pour cinq ans. "Il avait une meilleure connaissance de la ville", plaide Patrice Beghain, adjoint à la Culture. Et de bonnes garanties financières. Sur un air de déjà vu, on nous explique que l'on ne reproduit pas les vieilles erreurs. "Avant, la Ville n'avait pas fixé d'objectif culturel, le gestionnaire gérait donc la salle au mieux de ses intérêts. Victor Bosch s'était naturellement tourné vers l'activité la plus rentable", explique Patrice Béghain. Pas d'objectif culturel certes, mais la Ville versait à Victor Bosch une subvention annuelle de 150 000E, en plus de la mise à disposition gratuite de la salle. Concrètement, la Ville de Lyon finançait les tourneurs français et étrangers et, comme le rappelle justement Patrice Béghain, "ce n'est pas le rôle d'une ville de gérer une salle de concerts". Désormais, Victor Bosch devra donc s'acquitter de 12 000E annuels pour la location de la salle et aura l'obligation de programmer au moins 20 groupes locaux ou régionaux par an. Il devra s'appuyer sur des associations locales faisant un travail de promotion et de professionnalisation et s'efforcer d'intégrer dans sa programmation annuelle de spectacles un artiste local ou régional en première partie. Par ailleurs, le Transbordeur devra accueillir, à raison de douze jours de résidences par an, des artistes locaux ou régionaux en voie de professionnalisation.Petits budgets et petites ambitions"Il s'agissait de mettre le Transbordeur au diapason de la politique culturelle de la ville", souligne l'adjoint à la culture. Une politique quelque peu frileuse selon Thierry Pilat, dont la candidature a été écartée en dépit de son implication dans le secteur des musiques actuelles. La Ville aurait en effet voulu voir Thierry Pilat s'associer avec l'un des deux autres candidats ; "Je refusais de servir de caution culturelle, explique-t-il, d'ailleurs ni Bosch, ni Pommier ne m'ont proposé une alliance". C'est donc l'argument financier qui a prévalu. "Victor Bosch est fort en business, souligne Thierry Pilat, mais il n'ira pas plus loin que ce qui est imposé par le cahier des charges". Selon lui, cette décision est le reflet de la politique de l'équipe en place : "Une fois de plus, la Ville a joué petit en essayant de mettre tout le monde sous son giron". Petites sommes pour petites réalisations, les chances de voir le Transbordeur se transformer en un véritable outil de création sont bien minces. "C'est une très bonne opération pour la Mairie" conclut Thierry Pilat. Les subventions seront en effet diminuées, au minimum, de 50 %.


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