Acteurs studieux

Théâtre / L'ENSATT est partout. Des comédiens et des techniciens de qualité, soutenus par des dispositifs financiers exceptionnels ; le système d'insertion professionnelle de l'école a fait ses preuves. Pour le meilleur... le plus souvent ! Dorotée Aznar


Difficile d'échapper aux comédiens de l'ENSATT. La décentralisation de l'école est un succès réel et l'implantation d'autant plus remarquable que l'on connaît les réticences de la capitale des Gaules à accueillir les corps étrangers. Plusieurs raisons à ce succès. Tout d'abord la qualité incontestée des comédiens et techniciens qui y sont formés et qui ont "régénéré le paysage local en offrant une chance incroyable à Lyon et à toute la région" selon Michel Raskine, directeur du Théâtre du Point du Jour. Ensuite, l'école a su s'appuyer sur un système d'aides financières et d'insertion professionnelle défiant toute concurrence. L'ENSATT, qui dépend du ministère de l'éducation nationale, dispose en effet de fonds propres affectés non pas aux projets d'élèves mais aux élèves eux-mêmes. Les jeunes diplômés peuvent donc voir leurs salaires pris en charge par l'ENSATT à leur sortie de l'école, ponctuellement mais à plusieurs reprises. Une aubaine pour les metteurs en scène et les jeunes compagnies porteuses de projets artistiques innovants mais insuffisamment pourvues financièrement. Et pour les comédiens qui, en règle générale, parviennent à trouver du travail assez rapidement après leur diplôme.Perversion du systèmeEfficace voire imparable, le système a pourtant des effets pervers notables. "Ce dispositif, s'il est utilisé à mauvais escient peut permettre à des metteurs en scène de monter des équipes entièrement subventionnées, alors même qu'ils pourraient payer des comédiens", déplore Michel Raskine. "Personnellement, j'engage des comédiens pour des raisons artistiques, mais ce n'est pas le cas de tout le monde sur la place. Pour certains, il s'agit de main d'œuvre gratuite", ajoute-t-il. Abus caractérisés ? Sans doute selon Raskine, pour qui ce dispositif de financement devrait être laissé aux jeunes compagnies, afin d'éviter les dérives. Marianne Pommier, jeune comédienne diplômée de l'école, tend à relativiser ces propos. Selon elle, même les structures plus importantes n'ont parfois pas d'autre choix que de demander l'appui financier de l'ENSATT. Tensions entre les metteurs en scène et aigreurs des comédiens provenant d'autres écoles de la région moins cotées, il n'y a qu'un pas pour accuser l'ENSATT de tous les maux. Michel Raskine tient à clarifier sa position concernant l'emploi des comédiens : "Si l'ENSATT ne subventionnait pas ses acteurs, il n'y aurait pas plus de travail pour autant. Il faut se poser les vraies questions, notamment savoir pourquoi autant d'aspirants comédiens viennent chaque année grossir les rangs. Il ne faut pas être injuste avec les diplômés de l'école. Les metteurs en scène seraient fous de se passer de ces comédiens et de ces techniciens excellents."


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ENSATT, Kézako ?